Dataquitaine : « toutes les entreprises ont intérêt à structurer leur chaîne de la donnée »
Antoine Jeanjean et François Clautiaux ont lancé la journée Dataquitaine en 2018. Ici lors de la plénière d'ouverture de la 5e édition, en 2022 - crédit Dataquitaine
Organisée le 2 mars prochain dans les locaux de Kedge Business School, la 6e journée Dataquitaine met à l’honneur les problématiques, les enjeux et les perspectives du traitement de la donnée et de l’intelligence artificielle. Comment la filière régionale travaille-t-elle ces questions ? Les réponses d’Antoine Jeanjean, cofondateur de Recommerce, et vice-président de l’association Digital Aquitaine, qui réunit les professionnels du numérique à l’échelle de la région.
Vous avez pris la tête, il y a deux ans, d’un nouveau domaine d’excellence dédié aux sujets de l’IA et de la datascience au sein de Digital Aquitaine, par l’intermédiaire duquel vous portez désormais la journée Dataquitaine, dont la 6e édition se déroule le 2 mars prochain. Quelle est son ambition ?
Nous avons lancé en 2018, avec François Clautiaux, professeur de l’institut de mathématiques de Bordeaux, une première journée sur l’IA et la data, avec la conviction que ce serait intéressant de développer ces sujets en local. Nous avons rapidement réuni une centaine de participants, ce qui nous a convaincu de l’intérêt de prolonger cette dynamique, en nous appuyant sur les initiatives déjà lancées en parallèle par des associations de la région comme Bordeaux Datascience ou IA Pau. En parallèle, Digital Aquitaine constatait que ces thématiques revenaient souvent de façon transverse au sein des quatre domaines d’excellence déjà existants au sein de l’association (numérique en santé, mobilité intelligente, commerce connecté, usine du futur, ndr).
La création d’un « domex » dédié a donc été décidée début 2021, et c’est maintenant Digital Aquitaine qui porte l’événement Dataquitaine. Deux ans plus tard, le domex IA et datascience réunit 60 adhérents et une dizaine de bénévoles à l’échelle de la région, avec une équipe qui mêle des universitaires et des gens du privé. Nous avons par exemple monté un premier groupe de travail autour des algorithmes de tarification. Un autre se consacre à toutes les problématiques de DataOps, qui englobent tous les aspects liés à la gestion des projets IA et data. Dans la mesure où ces thématiques sont assez transverses dans les organisations, la mise en œuvre n’est pas toujours évidente. Pourtant, comme dans tout projet informatique, il faut un objectif, une deadline, un sponsor en interne, un calcul du retour sur investissement…
Nous avons également lancé plusieurs événements avec Aerospace Valley, autour de la défense, mais aussi de la place des femmes dans les projets IA et data, et de la façon dont l’industrie pouvait faire face aux questions de genre, de stéréotypes et de biais.
Quelles seront les principales tendances abordées lors de la journée Dataquitaine ?
La sobriété numérique fera partie des principaux sujets, à la fois sur la réduction de l’impact des algorithmes, et sur la façon dont on peut arriver à produire la même quantité de calculs en consommant moins d’énergie. Tout comme l’IA de confiance, dans la foulée de la chaire lancée par Laurent Simon à Bordeaux. Nous aurons également toute une partie autour du no-code, ces plateformes légères qui permettent de réaliser des choses complexes sans nécessairement mettre les mains dans le cambouis informatique, pour mieux se concentrer sur la partie modélisation ou sur les applications business. Cette idée de simplifier l’accès à des technologies complexes est une vraie tendance. Nous aurons également des interventions autour de tout ce qui concerne les catalogues et la structuration de données. Il y a en ce moment un vaste effort de normalisation engagé dans les entreprises, surtout les grandes, pour que tous les salariés parlent le même langage en matière de donnée. C’est un véritable enjeu de performance.
Vous avez collaboré avec l’ADI Nouvelle-Aquitaine dans la réalisation d’une cartographie des acteurs de la data et de l’IA à l’échelle de la région, qui référence plus de 170 acteurs publics et privés. Quel regard portez-vous sur cet écosystème régional ?
La cartographie réalisée par ADI souligne la présence conjointe d’écoles d’ingénieur, d’écoles de commerce et d’universités, avec des chercheurs de l’Inria et du CNRS, ce qui signifie qu’on dispose de compétences, de labos et de budgets et d’un bon vivier d’étudiants et de jeunes docteurs. À côté de ça, la région dispose d’un tissu d’entreprises de taille variée, avec des grands groupes historiques, comme Cdiscount, Aquitem ou ManoMano, des acteurs plus spécialisés, et de nombreuses sociétés de conseil, comme Keyrus, KPC, Capgemini ou Avisia, qui viennent à nos événements, amènent des projets et soulèvent de nouvelles problématiques de travail. Elles croisent généralement beaucoup de clients différents, ce qui leur confère une connaissance pluridisciplinaire utile.
La candidature portée par Digital Aquitaine à la dernière vague d’appels à projet de l’Etat relative au label pôle de compétitivité, centrée notamment sur les questions de sobriété numérique, constitue dans ce contexte une belle opportunité pour que la Nouvelle Aquitaine soit identifiée comme une région où l’on trouve des experts, des initiatives et des événements autour des problématiques d’IA et de data. C’est un véritable atout, dans un contexte où beaucoup de sociétés se demandent comment avancer de façon concrète sur ces sujets. Qu’on soit une grande entreprise, une PME, un supermarché, un docteur, il y a dans toutes les organisations une chaîne de la donnée qui demande à être organisée, structurée, optimisée et interrogée au regard de son impact environnemental, c’est un sujet qui concerne tout le monde, y compris les particuliers d’ailleurs !