Energies marines : le site d’essais hydroliens de Bordeaux change de dimension - Premium

C’est une page qui se tourne, mais pas le dernier chapitre. Discret, car immergé, n’ayant selon ses dirigeants jamais connus d’autres remous que ceux d’une Garonne qui lui donne tout son sens, le site d’essais hydroliens créé en 2017 à Bordeaux, à proximité du pont de pierre, change de mains. La fin d’une histoire pour Seeneoh, la structure ad hoc mis en place pour créer et piloter cet équipement. Vincent Laroque, directeur général de la SEML Route des Lasers, foncière immobilière spécialisée dans le développement économique, se souvient : « Nous avons été impliqués dans le projet dès 2015, sur sa phase de conception et construction. Puis les associés, Energie de la Lune, Cerenis, Valorem, ont demandé que Route des Lasers garde la présidence, ce qui est le cas depuis la création en 2017. » Outre la satisfaction d’être à la tête du site d’essais d’énergies marines « le moins cher du monde » (2,5 millions d’euros, deux tiers sur fonds publics), le président a vu passer plusieurs porteurs de projet industriels pour des essais et tests au long cours. Souvent pendant des mois voire années, « dans une logique de maturation de la technologie et de montée en puissance industrielle ». Ainsi du premier client Hydroquest (un an), suivi par DesignPro Renewables (2x12 mois), HPG (4 mois), ou encore de la station de mesure multiparamètres WiMo exploitée par la SABOM (Société d’assainissement de Bordeaux Métropole), qui analyse depuis 2022 quantité de paramètres du fleuve (pression, conductivité, salinité, température, turbidité, oxygène dissous…).Le Grand Port Maritime de Bordeaux a consenti une AOT sur 7 hectares. Crédit : Seeneoh.Au cœur d’une politique multisitesIl a peu, ce site bordelais d’essais hydroliens a changé de mains, pour rejoindre le giron de la jeune fondation Open-C. Créée il y a un an, basée à Nantes, elle s’appuie sur un établissement d’enseignement et de recherche, l’Ecole centrale de Nantes, avec l’appui d’une dizaine de partenaires dont l’Ifremer, RET, EDF, Valeco ou encore TotalEnergies. Cet organisme d’intérêt général à but non lucratif coordonne, développe et pilote cinq sites, déployés successivement depuis une quinzaine d’années et désormais fédérés sous sa bannière. Outre Bordeaux, trois sont en Bretagne (Paimpol-Bréhat, Saint-Anne du Portzic, Le Croisic) et un autre en Méditerranée (Saint-Louis du Rhône). « Cette logique multisites de la fondation permet de proposer une montée en puissance, avec des conditions d’exploitation donc techniques différentes. Cette mise en commun ouvre un continuum, une palette de possibilités de tests ainsi qu’une mutualisation du traitement des données », explique Etienne Pourcher, directeur des partenariats et de la communication d’Open-C. Pourquoi une fondation ?« C’est la meilleure structure juridique, cette alliance public-privé à but non lucratif, pour répondre aux besoins des industriels, aux enjeux environnementaux et se positionner en tant que tiers de confiance », analyse Etienne Pourcher, qui évoque également la gouvernance multipartite (trois académiques, sept industriels parmi les fondateurs) et la reconnaissance par l’UE de la fondation en tant qu’infrastructure de recherche permettant de capter des financements pouvant aller jusqu’à 100% du coût sur les infrastructures. « Cette fondation est, en l’espèce, un modèle économique bien plus pertinent que celui d’une société commerciale. Seeneoh a réussi à être juste à l’équilibre financier, mais au prix de gros efforts de nos partenaires », abonde dans une sorte de soulagement Vincent Laroque, qui confirme que, vidée de sa substance (actifs, effectif), la SAS Seeneoh clôturera son activité après l’été. Etienne Pourcher reprend : « Open-C peut s’adapter à la demande en matière d’innovation, d’autant qu’on pourrait imaginer d’autres sites encore, des éoliennes flottantes ou vers la grande puissance. Ça a plu à l’Etat que les sites soient regroupés dans une seule entité, ça apporte une visibilité internationale. Les industriels peuvent créer des démonstrateurs, ils ont besoin de volume et de visibilité, pour investir, faire baisser les coûts et aller vers une compétitivité commerciale. »Et de rappeler que l’hydrolien est la seule énergie renouvelable dont le volume de production est prédictible aussi longtemps à l’avance. « Aujourd’hui, nous sommes entre 200 et 300 euros du mégawattheure. Lorsqu’on aura atteint le premier gigawatteheure installé, on sera en dessous de 100 euros », se projette Marlène Kiersnowski, directrice du site bordelais. Un niveau toutefois bien supérieur à ceux annoncés lors des derniers appels d’offres sur l’éolien offshore, entre 44 et 45 euros.L’arrivée d’ORPC à BordeauxLe prochain à profiter des possibilités offertes par le site bordelais devrait être ORPC. Cet opérateur américain, fondé il y a 20 ans dans le Maine, planche sur une technologie de turbine à flux transverse. À ce stade, elle permet de fournir des solutions de micro-réseaux électriques intelligents, à même d’alimenter des petites communautés humaines isolées. Adaptée aux environnements fluviaux, marins mais aussi estuariens, la turbine peut fonctionner dans les deux sens, à marée montante comme descendante. ORPC table sur un à deux ans de présence dans le lit de la Garonne, pour ce qui serait tout à la fois un démonstrateur de son savoir-faire et un laboratoire pour préparer une montée en puissance. Un upscale en vue de se présenter comme une solution pour des clients industriels.Turbine RivGen, actuellement en opération en Alaska et au Canada. Crédit : ORPC

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