Vers un premier crémant du Pays basque ? - Premium

Pour l'instant, les vignes ne mesurent encore qu’une trentaine de centimètres hors du sol. Pour autant, depuis son terrain vallonné de Briscous, Julien Després se projette déjà bien sur ses futures bouteilles de vin. Un vin basque, crémant. Et pourtant, rien ne pouvait laisser penser qu’il se lancerait dans un tel projet. En effet, son nom ne vous dit peut-être rien, mais ce néo-Beskoiztar est un ancien multiple champion d’aviron. Sa carrière terminée en 2016, il s’est reconverti. Une première fois comme ingénieur en efficacité énergétique, puis une deuxième dans le vin, pour se reconnecter avec ses racines, avec un père vigneron dans le Périgord. « J’avais ça dans le sang », souligne Julien Després. Pendant quelques années, il a monté une entreprise pour faire connaître des producteurs du Sud-Ouest, et animer des rencontres entre professionnels. Une manière aussi de se former, « de comprendre les modèles qui marchaient et ce qui faisait la performance globale d’une entreprise », précise-t-il. « Ensuite j’ai fait marcher la machine à réflexion », sourit-il. C’est finalement en 2020 que l’ancien rameur a franchi le pas et acquis un terrain et son corps de ferme à Briscous. Là où pâturaient, il y a encore quelques années, des brebis, poussent désormais des rangées de vignes et des arbres fruitiers. « On a appris par les anciens qu’il y a 60/70 ans, il y avait déjà des vignes », raconte Julien Després. Le viticulteur a donc planté 10.000 pieds de cinq cépages différents, qu’il n’a pas choisis au hasard. Du camaralet, « un cépage des Pyrénées » ; du chenin ; du voltis « un hybride qui résiste aux maladies comme le mildiou et l'oïdium » et enfin la Muscadelle et le glera, « deux cépages résistants, et qui tiendront mieux avec le réchauffement climatique ». En effet, alors que les viticulteurs subissent années après années les premiers effets du changement climatique, Julien Després a fait des choix, pour s’en prémunir autant que possible. Pour lutter contre le risque de la pluie, il a choisi de planter ses vignes en hauteur « sur des terrasses, pour que l’eau s’écoule lentement », et de créer des bassins. Contre les maladies, outre le choix d’un cépage résistant, il produira en biodynamie ; contre le gel, il mise sur des vignes plus hautes et sur des arbres autour de la propriété pour créer « un microclimat ». Lorsque les premières vignes seront matures, il pourra réaliser ses premières bouteilles, en « vin de France », et souhaite miser sur deux vins, une sorte de crémant basque, en blanc de blanc, et un demi-sec. Du raisin dont la première récolte est prévue pour 2025, de quoi laisser encore au néo-viticulteur le temps de s’équiper petit à petit. Rien que sur la partie agricole, Julien Després a déjà investi 150.000 euros. Car il a également planté 2.500 arbres et arbustes, et doit désormais également faire restaurer son chai. Non seulement pour assurer la production de ses bouteilles, mais aussi pour accompagner le développement de son projet plus global. Car l’ancien sportif de haut niveau ne veut pas seulement produire des bouteilles, il veut également faire de son lieu un espace de rencontre et le situer sur la carte du tourisme viticole. « On a déjà eu cinq classes qui sont venues », souligne le viticulteur. Faire venir les scolaires, mais aussi les entreprises, et leur permettre par exemple d’organiser des séminaires sur place. Une manière de faire découvrir sa production, et de vendre directement. Car Julien Després veut miser principalement sur une vente directe sur sa propriété. « Je vise les 75% en direct et le reste via des intermédiaires comme les épiceries et CHR », poursuit-il. Une manière de garder la main sur sa production, un point essentiel lorsque les vignes produisent plus que d'habitude ou à l’inverse beaucoup moins.Objectif 10.000 bouteillesAinsi il veut miser sur une clientèle touristique, mais aussi et surtout locale « qui viendra visiter ». Misant sur un modèle œnotouristique comme ce qui se fait de l’autre côté de la frontière, dans la Rioja. « Là-bas, il y a des architectes qui fournissent une expérience plus qu’un contenu », souligne l’entrepreneur. « On veut faire vivre une expérience autour de la vigne ». Dans son business model, il compte sur une vingtaine d'événements par an et espère faire venir non seulement des entreprises pour des séminaires, mais aussi des associations, et de manière générale un public avec un attrait à l’environnement. « On veut des événements écologiques », explique Julien Després. S’il compte sur cette partie visite œnologique, c’est que l’ancien rameur a bien conscience que « sur une création, miser uniquement sur la production, ça serait un pari un peu fou ».Avec son crémant basque, Julien Després ne veut pas marcher sur les plates-bandes de l’Irouléguy, mais proposer un produit différent, avec un placement marketing différenciant et une bouteille qu’il voudrait à environ 15 euros. Pour la première récolte en 2025, il espère réaliser une production de 500 bouteilles mi-2026. Mais à terme, il table sur 10.000 bouteilles.

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