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« J'ai peur qu'on se mette à l'arrêt par jeu politique »

Écosystème
jeudi 05 décembre 2024

Franck Valletoux est dirigeant fondateur du cabinet Stratégies Locales, à Bordeaux. Crédit : LinkedIn

Franck Valletoux, du cabinet Stratégies Locales basé à Bordeaux, spécialiste des finances publiques, analyse les conséquences sur l'économie régionale de la chute du gouvernement. Il alerte sur un risque de chute des investissements, sur l'avenir obscur des trois prochaines années et le rôle des collectivités locales qui, à son avis, doivent tenir le rôle de soutien de l'économie locale.

Quelles sont les conséquences sur l'économie régionale de la chute du gouvernement ?
L'incertitude engendrée dans les esprits est forte, les investisseurs sont craintifs car ils ignorent les règles et la législation qui seront imposées. Dans ce flou, il est donc difficile de prévoir quoi que ce soit. Evidemment, les taux d'intérêt augmentent depuis la dissolution. Les conséquences touchent tout le monde : les consommateurs, l'immobilier… mais les quelques mesures destinées à la relance ne sont plus d'actualité. L'incertitude perdure et s'accentue.

Vous observez l'économie sous l'angle des collectivités. Comment interprétez-vous leur positionnement ?
Les collectivités locales constituent un acteur important dans l'économie. Or elles se trouvent dans une inquiétude forte sur l'avenir. Je pense que la commande publique, normalement, ne va pas baisser car 2025 est la dernière année du mandat en cours. On observe généralement que c'est durant les dernières années de mandat qu'elles sortent leurs projets. Néanmoins, en l'occurrence, à force d'incertitude, ils risquent de remettre en cause leur programme d'investissement. Nous l'avons déjà vécu entre 2014 et 2017, où il y a eu 10 milliards d'investissement en moins. C'était catastrophique.

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Les collectivités génèrent 70% de l'investissement public mais elles annoncent une chute de l'investissement. Quel est le poids, selon vous, de leur position ?
Au-delà de leur inquiétude légitime, les collectivités sont désendettées, leur niveaux d'autofinancement (sauf les départements très impactés par la baisse des recettes) n'est pas mauvais. Elles ont donc un moteur pour investir. Cela dit, à force de soubresauts, j'ai peur qu'on se mette à l'arrêt par jeu politique. J'observe des positions politiques un peu surjouées. J'ai bien conscience que ce que je dis ne sert pas la cause de la discussion - négociation avec l'Etat. Mais structurellement les collectivités vont plutôt bien. En France, elles pèsent 60 milliards d'investissement par les routes, le bâtiment, les travaux de réhabilitation, le chauffage et divers postes qui alimentent l'économie. Il me semble qu'il est de la responsabilité des élus, dans ces périodes troubles, de soutenir l'économie locale. Il faut se mettre à contrecycle.

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Comment voyez-vous les prochaines années ?
2025 est la dernière année de mandat, en 2026, il y aura les élections municipales, puis ce sera le début du mandat donc rien ne va redémarrer. C'est terrifiant. Les élus disent qu'ils sont étranglés mais les chiffres ne montrent pas la même réalité. Je pense qu'il ne faut pas surréagir. Dans le plan de loi de finances clôturé, des efforts étaient demandés mais ils sont tombés. Par conséquent, si le discours ne change pas alors que les efforts sont tombés, ce sera étonnant. Certes, il y aura encore des efforts à faire de la part de collectivités mais, globalement en France, elles ont, des excédents. Et, vu de Bercy, on se dit qu'on va les mettre à contribution.

Y a-t-il des leviers pour soutenir l'économie ?
La priorité c'est de relancer l'immobilier car la crise dure depuis deux ans. Le logement constitue le seul axe économique qui permettait un impact immédiat sur le PIB. Or, la dynamique immobilière est totalement en panne. Ce secteur nécessite un temps de latence avant de se relancer. On est tombé très bas (50 à 60% de baisse de production de logement), c'est invraisemblable. Les acteurs de la construction attendent des mesures ultra rapides pour relancer dans un à deux ans. Il existe des groupes immobiliers qui ne peuvent plus attendre, surtout si les collectivités locales se mettent en panne.

Franck Valletoux est également président de la société coopérative Procivis Nouvelle-Aquitaine, spécialisée dans l'accompagnement à l'accession à la propriété et au logement.

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