Nicolas Girardin : dans l'IA, « le Béarn a des pépites en cours de formation » - Premium

L’IA peut-elle être qualifiée de secteur d’excellence pour le Béarn ? Nous ne sommes pas en pointe sur l’IA en tant que telle, mais notre ambition, c'est que le Béarn devienne un leader de l’usage de l’IA, un usage que l’on veut raisonné et raisonnable, pas à l’aveugle, en étant conscient que l'humain doit rester aux manettes. L’IA est un outil qui fait des suggestions.Il y a pourtant, sur le territoire, des startups en pointe sur l’IA… On peut dire que l’on a des pépites en cours de formation. LipStip, BS Digital, Prof en poche, Brawo… plusieurs très belles entreprises font de l’IA et vont certainement prospérer et se faire une place sur l’écosystème national. Mais ce ne sont pas des entreprises qui développent des nouveaux modèles, comme Mistral. Elles appliquent l’IA à des verticales particulières : la comptabilité, les RH, le droit, l’éducation… Je pense que c’est sur ce genre d’usages que nous avons, en Béarn, une place à nous faire.Faire adopter l'IA par l'industrieL’enjeu, pour IA Pau, est-il de favoriser l’émergence de nouvelles entreprises comme celles-ci, basées sur un usage innovant de l’IA, ou bien d’encourager l’adoption de l’IA par les entreprises existantes ? Les deux. Les exemples que nous avons évoqués, ce sont des entreprises qui font du développement. IA Pau veut favoriser une adoption raisonnable de l’IA par tout un ensemble d'entreprises, et notamment par le secteur de l’industrie. Toutes les entreprises pourraient gagner en compétitivité grâce à l’utilisation de l’IA. Ça peut être pour des actions générales de gestion d’une entreprise, d'interaction avec des tiers, de marketing-communication, mais aussi sur des processus centraux de l’entreprise : par exemple gestion de stock, conception, vérification de conformité… Pour le festival IA Pau, nous avons mis en place, pour la première fois, des ateliers orientés vers un public en découverte, des gens qui pensent que l’IA peut leur apporter plus de performance au quotidien. Et sur l’année 2025, on voudra répéter ce type d'atelier pour aider les entreprises du Béarn à s’approprier ces outils. Nous sommes convaincus qu’à l’avenir, et après une phase d’adaptation, les entreprises qui n’intègrent pas l’IA seront défavorisées par rapport aux entreprises qui le feront.À lire également - La sixième édition du festival IA Pau se tiendra le 6 décembre D’après vous, l’arrivée de l’IA est-elle, pour les entreprises, une révolution comparable à celle d’internet ? Je pense même que c’est du même degré que l’industrialisation. Les machines-outils, dans l’agriculture et l'industrie, on fait gagner énormément de temps. Avec l’IA, les entreprises sont en train de gagner 20, 30, 40, 50% de temps sur certaines tâches. Des revues, des générations de texte, peuvent être faites en une heure au lieu de deux ou trois heures avant. Forcément, les entreprises qui n’intègrent pas l’IA vont y passer autant de temps qu’avant, et elles seront désavantagées. Il y a aussi, pour l’industrie, la question de l’IA appliquée à la robotisation. Jusqu’à aujourd’hui, les robots étaient peu adaptables aux nouvelles situations. Aujourd’hui, un bras robot peut devenir beaucoup plus adaptable, il peut interpréter les situations à la volée et réagir en conséquence.Anticiper l'IA pour ne pas la subirComment se lancer dans l’adoption de l’IA, pour une entreprise ? La première étape pourrait être de venir à un des ateliers proposés par IA Pau. Nous avons aussi mis en place un accompagnement à destination des entreprises industrielles et de services aux industries, pour leur proposer un audit gratuit de leur situation. C’est financé par l’Europe, et cela leur permet d’avoir un retour sur le type d’IA qui pourrait être mis en place dans leur entreprise, et pour quels bénéfices. Ces audits peuvent ensuite être suivis de formations, qui sont gratuites ou très fortement subventionnées, et de preuves de concept elles aussi subventionnées. Il faut aussi prendre en compte autre chose : les salariés vont, le plus souvent, faire appel de leur propre chef à des outils d’IA de façon autonome. Il faut que les entreprises mettent en place des politiques d’utilisation de l’intelligence artificielle, sinon il y a un risque assez fort de pertes d’informations confidentielles. Les salariés doivent être sensibilisés là-dessus : sur les modèles gratuits, la plupart du temps, les données qu’ils saisissent sont utilisées pour entraîner le modèle et pourraient ressortir lors de requêtes d’autres utilisateurs.Cela soulève la question de la propriété de l’IA. Si les employés d’une entreprise se mettent à l’utiliser individuellement, il y aura gain de productivité, mais l’entreprise n’en sera pas propriétaire…Les salariés vont utiliser l’IA de toute façon, c’est inévitable. À mon avis, les entreprises doivent mettre à disposition de leurs salariés des comptes chat [interface de discussion avec une IA générative de type ChatGPT, ndlr] professionnels, sous la bannière de l’entreprise, et ne pas autoriser l’utilisation d’outils personnels. Il doit y avoir la possibilité de contrôler ce qui est mis dans le chat. Il faut vraiment se saisir de cette question : de la même façon qu’aujourd’hui, des templates ou des macros Excel, des procédures, peuvent avoir beaucoup de valeur pour une entreprise, demain, des prompts [instructions écrites données par l'utilisateur à une intelligence artificielle, ndlr] donnés pourront aussi représenter de la valeur.

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