« Réindustrialisation, transition, soutien aux filières locomotives » : Christine Bost place ses priorités - Premium

Christine Bost est présidente de Bordeaux Métropole depuis mars 2024. Première femme à diriger la plus grosse intercommunalité de la région (2 milliards de budget, 5.000 salariés), elle a pris son poste dans le contexte de la maladie d'Alain Anziani. À la Métropole, elle a assuré la vice-présidence de l'urbanisme (2008-2014), puis des zones d’activité de proximité, économie sociale et solidaire, commerce et artisanat. Votre axe politique est-il dans la droite lignée d'Alain Anziani ou fixez-vous de nouvelles directions depuis six mois ?La ligne d'Alain Anziani se pose sur trois piliers : l'emploi, le rééquilibrage entre les territoires et la transition écologique. Ce triptyque est le bon. Il reste ancré dans les feuilles de route de chacune des directions du développement économique et pas seulement de celui-ci mais également des autres compétences. La collectivité, par ses propres politiques, est pourvoyeuse d'une dynamique, par la commande publique et par l'orientation des grands axes. Dans les missions économiques de la métropole, il n'y a pas seulement celles d'accompagnement, la métropole est aussi un système endogène qui génère un dynamisme économique. Toutes ces politiques génèrent donc aussi de l'emploi : accueil des matches des JO, du Top14, la Coupe du monde de rugby… Les retombées économiques de ces événements multiplient par sept les dépenses sur notre territoire. Par ailleurs, nous avons la possibilité de poser comme priorité des valeurs qui nous sont chères comme le respect de l'environnement, par exemple, dans les marchés.« Cette attractivité nous oblige »Comment déclinez-vous les trois axes de votre politique économique ?Tout d'abord, la réindustrialisation. Elle est primordiale. Nous nous sommes battus pour le site de Ford, pour pouvoir être dans le jeu et nous assurer que le foncier puisse accueillir de l'industrie. C'est un bel investissement qui a permis de recevoir Hydrogène de France, qui sera pourvoyeur d'emplois. La transition est un pilier structurant de notre politique. Dans nos interventions, on travaille avec la CCI ou la Chambre des métiers sur la manière d'aider les entreprises à entrer dans leur transition. Enfin les filières locomotives, l'aéronautique et l'aérospatiale notamment, continueront de faire partie de nos priorités. Nous travaillons également sur l'économie sociale et solidaire (ESS), un nouveau modèle économique qui n'est pas si nouveau que cela. Il a besoin d'être fédéré, reconnu et banalisé. Tous ces nouveaux modèles ont besoin de ne plus être nouveaux, finalement. Quels sont les résultats de cette politique que notez aux trois quarts de la mandature 2020-2026 ?Les résultats sont bons, je pense que nous sommes sur la bonne voie. Sur l'emploi, dans un contexte plutôt difficile, nous tirons plutôt bien notre épingle du jeu. Le baromètre sur l'attractivité des métropoles (Odoxa, 2023) qui nous place en tête des chefs d'entreprises et des salariés vivant ailleurs est valorisant mais cela nous oblige aussi. Nous devons répondre donc à plusieurs problématiques. Celle du foncier pour accueillir les nouvelles entreprises qui souhaitent s'implanter chez nous. Comment, dans cette exigence, on travaille avec les autres territoires autour de nous et dans tout le département. Et comment, dans tout cela, on maintient une qualité de vie.À lire également - Stéphane Delpeyrat (Bordeaux Métropole) : « nous avons encore un gros potentiel »Quel est le levier de la Métropole pour proposer du foncier aux entreprises qui en cherchent ?Il reste encore un peu de place. Mais ce tout petit peu peut se trouver si on reste dans le monde d'avant. C'est-à-dire si l'on pense ne faire que de grandes zones d'activités, là en effet, il ne reste qu'un peu de place. Sans compter les contraintes environnementales, le zéro artificialisation… Cela doit nous contraindre à réfléchir différemment sur la façon dont on aménage notre territoire, sur comment le tissu économique cohabite avec le tissu existant, l'économie elle-même ou l'habitat. La question est comment on compose la ville, c'est quoi, aujourd'hui, implanter une entreprise, un service public… Nous avons plusieurs opérations où on travaille avec le porteur de projets, l'architecte sur des compositions différentes que celles dont on a l'habitude. Le hangar, grand et seul en métal, à l'ancienne, c'est terminé. On essaie de travailler sur la mutualisation de certaines fonctions sous forme de villages industriels insérés dans le tissu urbain et où les interactions sont possibles entre les entreprises, accueillir l'artisanat, les PME. On dirait presque une place de village ! On travaille aussi sur les baux. La métropole accorde un droit à construire, moyennant une redevance, et sur le long terme pour permettre aux entreprises de voir loin. Cela permet de garder les petites entreprises car nous en avons besoin.Engendrer des mixités fonctionnellesIndustrialisation et respect de l'environnement sont-ils compatibles ?Oui, les entreprises sont de plus en plus inventives pour « débétonner » . Cette idée est maintenant intégrée et cela va aller en s'accélérant. Nous pouvons accompagner les entreprises en ce sens. Notre rôle consiste à poser les conditions nécessaires pour que les entreprises des filières d'avenir s'installent chez nous et que celles engagées dans l'industrie décarbonée se développent. On a envie de les soutenir, de faire confiance à ce type d'enjeux, d'innovations. Notre rôle est aussi de séduire ces porteurs de projets pour que leurs innovations se fassent chez nous. Comment lever les freins à l'installation et faciliter l'implantation des projets?La Métropole soutient les écosystèmes, aide à l'animation de réseaux d'une myriade d'acteurs et peut les mettre en synergie. Nous utilisons les correspondants du développement économique sur les territoires pour être au plus près de l'économie. De plus, dans la façon dont on aménage nos quartiers, la question de la place des commerces de proximité, des services du quotidien peut engendrer des mixités fonctionnelles. Pour l'objectif zéro carbone à 2050, le projet InnoGaronne sur la rive droite est très fort, par exemple. Les acteurs qui n'ont pas, de base, une activité très verte ont compris que la transition leur offre une possibilité de développement. L'aéronautique, le portuaire mais aussi le MIN (Marché d'intérêt national) sont autant de secteurs ou de projets qui évoluent vers une transition.

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