Législatives : le SMIC à 1.600 euros « inquiète particulièrement les artisans » - Premium

Quel est votre sentiment, trois jours après le résultat des élections législatives ? On prend acte de la composition de l’Assemblée nationale, tout simplement. Ce qui sera important, ce sera de voir la photographie du gouvernement, car c’est cela qui donnera les lignes directrices. Pour l’instant nous sommes encore dans l’attente de savoir dans quel sens sera dirigée l’économie française, et notamment celle des TPE et des entreprises artisanales, qui nous préoccupent. L’attente pourrait être longue, car nous n’avons aujourd’hui aucun signe d’une possible annonce de gouvernement… Oui, et plus le temps est long, moins ça joue en notre faveur. On le voit, les gens attendent, sont inquiets, et cela rejaillit sur la consommation, les investissements. Dans les collectivités publiques également, il ne se passe plus rien - ce phénomène de pause existe de temps en temps en période estivale, mais actuellement il est sur-exagéré. À ce propos, comment vont les artisans de Nouvelle-Aquitaine ? Ils sont assez tendus, et ce pour plusieurs raisons. Ils n’arrivent toujours pas à se projeter, avec ce que l’on vient de dire. Les carnets de commandes sont loin d’être remplis, dans le bâtiment les permis de construire sont délivrés au compte-goutte, pour les métiers de bouche les gens font attention à ce qu’ils achètent… Tout cela a des répercussions directes. Mais malgré tout, je pense que nos artisans gardent le moral. Ils attendent de voir si certaines promesses de campagne seront tenues, car elles pourraient avoir des effets particulièrement importants sur nos petites structures…« Quand c'est l'heure de payer, on se tourne vers les entreprises » À quelles mesures faites-vous référence, par exemple ? À une mesure emblématique comme le SMIC à 1.600 euros [ndlr, portée par le Nouveau Front Populaire]. Quand on discute un peu avec les artisans, c’est la première chose dont ils nous parlent. Ils ont déjà encaissé beaucoup de charges ces dernières années, la hausse du prix de l’électricité, des matières premières, les obligations de mises aux normes diverses et variées… Là, ce serait la goutte d’eau. Il faut voir quelle serait la conséquence directe pour une entreprise artisanale - certains dirigeants devront peut-être se séparer d’un collaborateur, car ils ne pourront pas assumer une hausse de la masse salariale. Et puis, 1.600 euros pour le SMIC, cela signifierait un effet mécanique de revalorisation des grilles salariales. Celui qui est là depuis quelques années ne comprendrait pas pourquoi il se retrouverait au SMIC du jour au lendemain ! Ça inquiète particulièrement les artisans. Le Nouveau Front Populaire défend aussi une volonté de simplifier les démarches administratives, de réformer la fiscalité avec un impôt plus progressif - et donc censé être moins lourd pour les petites structures. Cela ne vous rassure-t-il pas ? Sur la simplification, il y avait une démarche qui était déjà engagée, des travaux étaient lancés au parlement. Une expérimentation devait être mise en place pour les TPE et les PME, et on l’attend avec impatience. Après en ce qui concerne les tranches d’impôt, certes, mais cela aura un coût derrière. Qui paiera ? C’est ça, le vrai sujet. On a l’habitude, à force, qu’on nous donne d’un côté pour nous prendre de l’autre. Et c’est le danger avec ce genre de mesures, car on connaît assez bien l’état des finances publiques. Et quand c’est l’heure de payer, on se tourne souvent vers les entreprises. Clairement, aujourd’hui, les sociétés artisanales n’ont pas les moyens.Une politique claire sur l'apprentissageConstatez-vous une hausse des redressements ou liquidations judiciaires, ces derniers mois ? Oui, depuis le début de l’année on observe un certain nombre d’entreprises en difficulté. Surtout, on remarque un autre phénomène qui est assez nouveau, à savoir le sentiment de ras-le-bol. Aujourd’hui, beaucoup d’entreprises artisanales baissent le rideau, non pas car elles sont en grande difficulté ou que le carnet de commandes est vide, mais juste car les dirigeants en ont ras-le-bol. Un matin ils se lèvent, et disent « stop, basta, on arrête tout ». Au bout d’un moment, diriger une entreprise comme les nôtres devient trop lourd à porter - les charges augmentent, il est très difficile de recruter du monde… Donc je pense que nos chers politiques, au lieu de parler du coût du travail, devraient peut-être s’interroger sur sa valeur. Et peut-être que ça nous aiderait pour avancer de façon un peu plus juste, et que ça changerait certaines choses. En tout cas, on espère pouvoir retrouver rapidement un climat apaisé, serein et de confiance, plus propice à la consommation. De quoi ont besoin, en priorité, les artisans français comme néoaquitains ? De pouvoir croire en l’avenir. Aujourd’hui on leur met plus de normes de contrôle, et les difficultés d’accès aux marchés se renforcent. Il nous faut de la simplification, que ce grand chantier se mette en œuvre. Ensuite concernant l’emploi, qui est aussi un élément important, il nous faut de la stabilité : ne pas nous dire un jour, « on met le SMIC à 1.600 euros », le lendemain nous enlever les primes pour l’apprentissage, encore après changer autre chose… Il faut que l’on ait une ligne de conduite, une vision sur l’avenir. Pour finir, une chose primordiale pour nous, dans les CMA, c’est que les politiques consolident un peu leur position sur l’apprentissage. Là encore on entend tout et son contraire, or l’apprentissage est vital. Ce sont les jeunes qui reprendront demain nos entreprises, et on a besoin de politiques claires sur le sujet.

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