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En Nouvelle-Aquitaine, des TPE et PME plus inquiètes pour leur trésorerie ?

Écosystème
mardi 25 juin 2024

Delphine Sabatey, présidente de l'Ordre des experts-comptables de Nouvelle-Aquitaine. Crédits : DR

En Nouvelle-Aquitaine, l’activité des TPE et PME est en légère baisse, de 0,6%, au premier trimestre 2024. Un constat dressé par l’Ordre des experts-comptables régional, dans son récent baromètre. Parmi les enseignements tirés, une activité plus contrainte en Gironde, des difficultés de trésorerie… et une inquiétude quant aux échéances politiques. Tour d’horizon avec Delphine Sabatey, présidente de la structure.

À l’échelle néoaquitaine, la baisse du chiffre d’affaires des TPE et PME n’est « que » de 0,6% selon votre récent baromètre. Mais si l’on regarde en détail, les départements ont des réalités bien différentes… Et la Gironde enregistre la plus forte baisse, de -1,7%. Comment expliquer cela ?
Oui, il y a des disparités et il y en a toujours eu. Mais il faut noter qu’à l’échelle nationale, la Nouvelle-Aquitaine est souvent dans le Top 3 ou 4 des régions les plus performantes, donc la baisse de chiffre d’affaires n’a rien d’inquiétant. Concernant la Gironde, l’un des éléments qui impacte le plus ce résultat, c’est la baisse d’activité dans le secteur de la construction et de la maçonnerie. Le tribunal de commerce de Bordeaux a récemment fait un point sur le nombre de procédures collectives, en forte hausse par rapport à 2023 - ce sont quasiment plus de 300 dossiers cette année. Trois secteurs semblent les plus touchés, l’hôtellerie et la restauration, la construction, et par effet ricochet les petits commerces.

D’après votre baromètre, certains secteurs comme la boulangerie-pâtisserie, enregistrent une hausse de leur chiffre d’affaires, en l'occurrence +4,7%. Comment analysez-vous ce résultat ?
D’abord, les indicateurs que nous publions ne sont pas nettoyés du taux d’inflation. On se focalise sur l’activité et donc le chiffre d’affaires, qui était durant longtemps un bon vecteur d’analyses. Et ce que l’on constate notamment dans le secteur de la boulangerie-pâtisserie, c’est que les professionnels ont réussi à majorer leurs prix pour maintenir ou minimiser la baisse de leurs marges. Évidemment ce n’est pas possible partout, et c’est problématique car un chiffre d’affaires ne veut pas dire grand-chose. Et ce que l’on constate, c’est que les entreprises ont un problème de marge et de trésorerie - c’est le nerf de la guerre.

Les inquiétudes se cristallisent-elles aujourd’hui autour de ces deux indicateurs ?
Oui, car les TPE et les PME doivent préserver leur trésorerie pour faire face notamment au remboursement des PGE, des dettes fiscales et sociales. L’ordre des experts-comptables et les tribunaux de commerce mènent un très gros travail de prévention des entreprises en difficulté, pour éviter qu’elles ne fassent l’autruche et se mettent encore plus en difficulté. Avoir des soucis est une chose, mais il existe plusieurs outils pour permettre de retrouver une petite bouffée d’oxygène, et de passer au-delà des difficultés. Pour éviter, in fine, la casse irrémédiable et la liquidation judiciaire.

Vers une embellie à la fin de l'année ? 

Il y a également la période politique dont il est impossible de faire abstraction… Que vous disent les dirigeants d’entreprise à ce sujet ?
Les législatives sont source de craintes, notamment car certains partis annoncent des mesures, disons, « préoccupantes », pour être politiquement correcte. Donc il y a cette inquiétude, après, il y a les JO qui passent notamment sur Bordeaux et devraient drainer plus de touristes sur la région bordelaise, et d’une manière générale, en Nouvelle-Aquitaine. Certains secteurs qui enregistrent une progression très modérée devraient être redynamisés sur les deuxième et troisième trimestres 2024 [ndlr, l’hôtellerie-restauration enregistre +1,5% de son CA selon le baromètre, la restauration traditionnelle +0,8%].

À quelles propositions de campagne faites-vous référence, par exemple ?
Disons que certains programmes sont un peu confiscatoires. Et pourrait avoir comme conséquence que l’entrepreneur qui réussit ou veut se lancer, risque de quitter le territoire français. Il y a des mesures compliquées, et le chef d’entreprises qui est quand même sensibilisé, et comprend tous les mécanismes de TVA, voit aisément que certaines mesures sont impossibles ou n’auraient pas l’effet annoncé. Lorsqu’on parle de baisser la TVA de certains produits en disant que cela augmenterait le pouvoir d’achat, qui se souvient de l’exemple des fleurs ? Est-ce que la baisse de la TVA pour ce secteur a fait diminuer le prix des bouquets ? Non. C’est ce genre de petits détails qui sont importants, et d’une manière générale, je pense que l’entrepreneur n’est pas dupe.

Quelles sont les perspectives pour les mois à venir, selon vous ?
On est quand même sur le fil du rasoir. Mais il faut garder espoir, confiance. C’est l’une des réussites de l’économie. On sent que le moral des chefs d’entreprise est fragile, et cela se traduit notamment par des dirigeants qui, lorsqu’ils sont en difficulté, demandent plus souvent la mise en liquidation de la société, alors qu’elle est redressable… Ils sont épuisés, et c’est un phénomène nouveau.