« Le moral des chefs d'entreprise de Nouvelle-Aquitaine est impacté par l'incertitude » - Premium

Elle représente la « banque des banques » et la garantie de la stabilité financière du système. Marie-Agnès de Montbron est directrice régionale Nouvelle-Aquitaine à la Banque de France, à Bordeaux. L'institution compte 130 personnes à Bordeaux et 330 dans toute la région. Vous observez l'économie néo-aquitaine depuis un an et demi que vous êtes en poste. Quel est son état de santé actuel ?L'économie de Nouvelle-Aquitaine est résiliente. Ce mot signifie que l'on sort plus fort d'une épreuve mais que l'on en garde des traces. L'économie régionale, comme ailleurs, garde des traces de la crise du Covid. Ces séquelles sont la hausse du coût de l'énergie, celle des matières premières, une plus grande difficulté au recrutement, une certaine désorganisation de la chaîne d'approvisionnement où tout n'est pas encore complètement rentré dans l'ordre et des entreprises endettées, car certaines ont utilisé leur PGE (prêt garanti par l'État) pour combler leur trésorerie. J'observe que nous ne sommes pas revenus à une situation d'avant Covid.Vous soulignez souvent les atouts de la région pour les affaires. Selon vous, quels sont-ils ?La Nouvelle-Aquitaine a de nombreux atouts économiques. Elle est la deuxième région, derrière l'Île-de-France, en termes de dynamisme d'innovation. Elle est très diversifiée, ce qui lui permet de ne pas avoir mis tous ses œufs dans le même panier. Elle compte des pôles et des filières de spécialisation comme le tourisme, l'aéronautique, la tech, la cosmétique ou la céramique. Son taux de chômage est inférieur à la moyenne nationale. Néanmoins, elle est tributaire, évidemment, du contexte national et international.L'action de la Banque de France en Nouvelle-Aquitaine en 2024. Crédit : Banque de FranceL'incertitude nationale et internationale impacte-elle tous les secteurs économiques régionaux ?Tout d'abord, précisons que cette imprévisibilité impacte fortement le moral des dirigeants. Un chef d'entreprise a l'habitude de gérer les aléas. Il sait les affronter lorsqu'il peut avoir une action sur ceux-ci. Lorsqu'il peut agir, il sait prendre les décisions, même si celles-ci l'embêtent. Sur le contexte national et international, le dirigeant n'a pas de moyen d'action. Il doit donc subir et s'adapter. Or s'adapter à quelque chose de prévu est le quotidien d'un entrepreneur. S'adapter à l'imprévisible est tout simplement impossible. Donc anxiogène. Cela se constate dans les derniers chiffres des études de tendance que nous menons chaque mois. Jusqu'à très récemment, les dirigeants que l'on interroge disaient qu'ils craignaient cette incertitude mais ne donnaient pas de notes basses à la question concernant leur moral. Ils le disaient juste. Maintenant, les indicateurs du moral des dirigeants de Nouvelle-Aquitaine se dégradent. Le moral des chefs d'entreprise de Nouvelle-Aquitaine est impacté par l'incertitude qui ne les incite pas à investir ou à entreprendre.La filière viti-vinicole est particulièrement attentive au contexte international. Que vous rapportent ses dirigeants ?Cette filière vit actuellement avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Elle est suspendue à la menace des taux de taxes américaines de 200% sur les vins européens. C'est le point de fragilité de l'économie néo-aquitaine, le secteur qu'il faut particulièrement surveiller. Le bâtiment et l'immobilier souffrent également. Pensez-vous qu'il faille les aider de la même façon ?Il faut être tout aussi attentif à ces secteurs bien sûr mais le bâtiment et le viti-vini ne vivent pas le même contexte. Les deuxièmes sont soumis à des décisions desquelles ils sont dépendants. Les premiers, eux, doivent faire face à une situation à l'intérieur de nos frontières. Le bâtiment peut plus facilement réorienter ses activités si besoin, il est plus agile de par la nature même de sa production. Pour conduire une vigne, faire un vin, cela prend des années, on ne peut pas faire pivoter une activité viti-vini. Les situations de ces secteurs ne sont pas comparables.Finalement, entre les forces et les faiblesses actuelles, comment ressentez-vous l'économie régionale ? Je pense qu'elle a su s'appuyer ces dernières années sur ses beaux atouts, elle a pu ainsi bien remonter et se développer. On pensait avoir touché le fond de la piscine et être en train de remonter. Pour autant, je ne sais pas si on a touché le fond de la piscine…

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