Ex-Virgin à Gambetta : quel chemin après le lancement avorté d’un chantier de rénovation ? - Premium

Fermé depuis le 13 juin 2013, l’immeuble ayant accueilli le Virgin Megastore de la place Gambetta à Bordeaux, déjà riche d’une histoire pleine de rebondissements, connaît de nouveaux soubresauts. Racheté en 2015 par Michel Ohayon, le bâtiment devait devenir un grand magasin, sous enseigne Le Printemps. Avant que le projet n’évolue en futur hôtel de luxe, 4 puis 5 étoiles, qui avait ensuite été annoncé comme abandonné, miné notamment par les difficultés en cascade de l’homme d’affaires girondin, avec la mise en redressement de sa société holding et navire amiral, la Financière Immobilière Bordelaise (FIB). L’entrepreneur semblait même ouvert à l’idée de céder cet actif immobilier. Au cœur de l’été dernier, une annonce lâchée dans le cadre feutré de l’InterContinental Bordeaux, à l’occasion de l’inauguration de son salon de thé Le Boudoir de Léa, relançait la machine.Michel Ohayon évoquait à cette occasion revenir à son projet d’hôtel 5 étoiles, avec une enseigne lifestyle du groupe InterContinental, a priori un peu moins haut de gamme que le prestigieux établissement de la place de la Comédie. Coincée entre une dissolution aux conséquences encore inconnues et les Jeux olympiques à venir, la séquence semblait s’arrêter là, jusqu’à ce que le vacarme de marteaux-piqueurs ne sonne le réveil définitif de toutes les parties prenantes du projet. Une dalle de béton, coulée seulement quelques jours auparavant sur le trottoir devant l’immeuble, était alors détruite.Histoire(s) de permis de construireAlors que les travaux semblaient devoir démarrer, la mairie de Bordeaux mettait aussitôt le holà, le propriétaire ayant omis de déposer une demande d’autorisation préalable auprès des services municipaux. Ce chantier avait été lancé sur la base d’un permis de construire, déposé et obtenu en 2021. Premier souci : au bout de trois ans, les travaux n’avaient pas été lancés, la mairie est venue constater l’absence de chantier à date échéance et ce PC est donc devenu caduc. Second souci : ce permis concernait un bâtiment de commerces. Pas un hôtel. Une seconde demande de PC, cette fois pour un établissement hôtelier, avait bien été déposée à la fin de l’hiver dernier, via la SNC Gambetta Revival. La mairie avait jusqu’au 22 septembre pour instruire ce dossier dans lequel de nombreux services - Bâtiments de France, pompiers, gestionnaires de réseaux… - devaient être consultés. Par courrier arrivé à destination le 18 septembre dernier, le couperet tombait : refus de la mairie.« Le PC contrevient aux règles du PSMV [ndlr, Plan de sauvegarde et de mise en valeur, adopté par la Ville de Bordeaux en 2022], en particulier sur un point. Sur la place Gambetta il y a des linéaires commerciaux qui viennent protéger les changements de destination. L’objectif c’est de conserver du commerce de détail et du commerce de proximité », explique Stéphane Pfeiffer, adjoint au maire de Bordeaux, notamment en charge de l’urbanisme résilient. « Donc ce qui était avant du commerce de détail doit rester du commerce de détail. Or, dans ce dossier, le rez-de-chaussée comprenait le hall d’accueil de l’hôtel, qui prenait une partie importante et un restaurant. Ce changement de destination n’est pas permis par le PSMV », poursuit-il.Le fil de la discussion n’est pas rompuEngagée dans une démarche de rénovation de la place Gambetta, avec la volonté de lui donner une dimension populaire, la mairie est-elle viscéralement opposée à un projet d’hôtel de luxe, de surcroît porté par un entrepreneur à la réputation quelque peu sulfureuse ? Sur le fond, les intentions ne coïncident pas. Ce qui ne ferme pas la porte à tout, car un permis de construire est avant tout un acte administratif, qui résulte de l’examen du respect des règles. L’ambition politique n’entre pas en ligne de compte et ne relève que de la discussion entre pouvoirs publics et investisseurs privés. Une rencontre est prévue en fin de semaine entre la mairie et l’architecte du projet, Michel Pétuaud-Létang, complice de longue date de Michel Ohayon. « On va discuter de tout ça avec lui », confirme l’élu. Qui pousse un autre argument : selon le schéma métropolitain des accueils et hébergements touristiques, avec les nouveaux projets déjà lancés de 4 et 5 étoiles, « la ville de Bordeaux va être suffisamment dotée en hôtellerie haut de gamme », mais serait toujours en manque de 2 et 3 étoiles. Un schéma qui peut servir de support à l’expression d’une volonté politique, mais n’a pas de pouvoir contraignant.Un projet d’hôtel, sans présager de la gamme visée par l’établissement, est-il possible dans ce bâtiment ? « Je pense que réglementairement c’est jouable, s’il n’y a pas de restaurant en rez-de-chaussée et si le hall de l’hôtel ne prend pas une place trop importante sur l’infrastructure », estime Stéphane Pfeiffer. Un chemin - fut-il de crête - existerait donc. « Ce qu’on demande depuis le début à Michel Ohayon, c’est de travailler un projet qui soit accessible pour les gens. On avait planché avec le président de la CCI Bordeaux Gironde pendant un petit moment », glisse l’élu. De cette réflexion commune avait notamment émergé l’idée d’un lieu « qui puisse mettre en avant des savoir-faire, valoriser le patrimoine viticole. La CCI était plutôt intéressée ».Reste que ce n’est pas l’option choisie par le propriétaire et son architecte, dont le projet d’un point de vue préservation et valorisation du patrimoine est « assez qualitatif ». Le sujet n’est vraiment pas sur ça, nous assure-t-on. « Ça fait presque 12 ans que ce bâtiment est vide. Ce n’est pas acceptable que ce bâtiment de la place Gambetta soit vide encore 12 ans. Donc il faudra trouver des solutions. » Là où il y a une volonté, il y a un chemin.

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