Comment Pollen Robotics veut devenir LA plate-forme pour la robotique humanoïde de service - Premium

Deuxième jour du mois d’octobre, pour la présentation de la deuxième version du Reachy, robot humanoïde créé par la société Pollen Robotics, dont le premier modèle, bête de concours, avait bénéficié mi-2023 d’une confortable levée de fonds seed de 2,4 millions d’euros. Une manne mise à profit pour arriver à « cette deuxième version très différente de la première », annonce Elsa Kervela, responsable marketing de l’entreprise, qui argumente. En un an, la charge utile de chaque bras est passée de quelques centaines de grammes à trois kilos. Reachy, qui n’a pas fait que de la gonflette, est aussi désormais capable de réaliser des tâches « beaucoup plus précises, mais aussi intenses ou répétitives, pour répondre à des besoins d’environnements de travail ». La robustesse globale a été améliorée, tout comme le système de vision, « pour pouvoir faire de la téléopération, mais aussi faire de l’enregistrement de données en vue de lui apprendre des comportements autonomes ».Pour l’heure, Reachy 2 est proposé en quatre versions, pour créer une gamme modulable : à un ou deux bras, avec ou sans base mobile motorisée. « Reachy n’est pas un robot bipède et c’est un choix délibéré », nous explique-t-on. « La bipédie coûte cher, est complexe à réaliser et limite les applications. » Le credo est répété : « intégrer les robots humanoïdes dans le monde réel ». L’engin a gagné en muscle, mais aussi en cervelle. Grâce à des partenariats avec Meta mais aussi Hugging Face, il y a eu « un vrai mentoring technique, avec l’idée de créer une plate-forme robotique faite pour incarner l’intelligence artificielle ». Résultat : plus l’utilisateur montre de choses à Reachy 2, plus on l’utilise et plus il performe, résume l’équipe.Le terrain de jeu pour la robotique et l'IALancé il y a cinq ans, le Reachy original a été vendu à une centaine d’unités, dans 20 pays dans le monde. Son frère « va continuer de majoritairement s’adresser aux laboratoires de recherche de pointe en robotique et en IA, publics comme privés », dont certains sont déjà clients. Les noms de Stanford, Berkeley ou encore les universités Cornell ou Carnegie Mellon sont cités. « Beaucoup de recherche académique, mais aussi des groupes privés. On travaille déjà avec Accenture mais aussi avec certains des GAFAM, qu’on ne peut pas nommer », poursuit-elle. Au-delà, elle pointe « un vrai attrait pour la robotique en milieu professionnel », dans de nombreux domaines d’activité : l’industrie, le retail, la santé, la restauration ou encore l’évènementiel. « Le but n’est pas de remplacer les humains, mais plutôt d’exécuter des tâches qui aujourd’hui ne trouvent pas forcément de main-d’œuvre, où il y a une vraie pénurie parce que ce n’est pas bien rémunéré ou mis en valeur. »Pour autant, « il n’y a pas encore de robotique déployée à ce niveau-là, l’état de l’art n’est pas encore au point pour mettre des robots qui peuvent fonctionner de façon autonome », consent-elle. Quel est alors l’intérêt du Reachy 2 ? « C’est une plate-forme d’exploration et de prototypage », qui va permettre de mettre en place des preuves de concept dans tous les secteurs cités. Avec l’idée d’être le plus polyvalent, pertinent et adapté que possible aux fonctionnalités qui permettront de faire émerger la robotique de service. « En robotique, il y a la partie interaction, la partie navigation pour que le robot se déplace et enfin la partie manipulation. On considère que ce dernier point est le plus gros challenge de la robotique de service », analyse-t-elle.Evolution du modèle économiqueC’est aussi ce 2 octobre que démarre la commercialisation de cette nouvelle version. Les 15 premiers exemplaires seront assemblés à l’interne, avant de passer le relais à de la sous-traitance, pour laquelle des discussions sont en cours afin de désigner l’entreprise adéquate. L’idée de totalement internaliser la production pourrait néanmoins revenir sur la table, sur une prochaine version. À l’heure actuelle, le modèle économique repose sur les ventes de la plate-forme Reachy, qui comprend le hardware, la partie logicielle et un open core. « On fait de la technologie qui est accessible en open source. Pour Reachy 2, on aura une partie du logiciel qui sera ouverte et accessible. Et petit à petit, on va mettre en place ce qu’on appelle un “stack d’IA”, qui permettra de faire tourner des applications d’intelligence artificielle qui seront développées en interne ou par nos utilisateurs. » La finalité ? « À peu près dans un an, aller vers un modèle freemium, avec cette partie core gratuite pour tous les utilisateurs, et un abonnement suivant l’avancement de chaque projet et suivant le besoin en support et en suivi du développement. On est en train de définir ce modèle qui devrait être mis en place fin 2025. »Une nouvelle levée pour viser la rentabilitéDiscrète sur son niveau de chiffre d’affaires ainsi que sur ses objectifs de vente, Pollen Robotics se projette d’ores et déjà sur une nouvelle levée de fonds, une série A qui serait bouclée idéalement « avant l’été 2025 », d’un montant sensiblement supérieur à l’opération conclue il y a un an. « Notre investisseur historique, avec qui on travaille très bien, souhaitera sans doute se réengager avec nous », annonce d’emblée Elsa Kervella. Un investisseur privé visiblement très désireux de rester dans la coulisse. Tout juste sait-on que cette personne, versée dans les sciences et les défis technologiques, est française mais n’appartient pas à l’écosystème tech néo-aquitain. Au-delà, « on va commencer à regarder au-delà des frontières françaises et à rencontrer des investisseurs européens. Et à côté de ça, nous sommes aussi en discussion avec des partenaires technologiques, des sociétés plus ou moins dans le même domaine mais qui ont une capacité financière plus importante et qui ont peut-être l’intention d’investir chez nous ».L’équipe, passée de 10 à 20 personnes en 2023, frôle désormais la trentaine de collaborateurs. « Notre feuille de route pour cette version 2 est pensée pour les industries, c’est-à-dire normée et certifiée, pour être déployée dans des environnements où elle cohabitera avec les humains en toute fiabilité et sécurité. C’est une grosse expertise qu’on va devoir aller chercher. » En outre, l’équipe commerciale devra être étoffée, « car on a des cycles de vente qui sont assez longs ». Tout en misant sur son équipe R&D « qui a une énorme appétence sur l’IA ». Pollen Robotics s’intéresse ainsi de près aux AI factories : « des entreprises qui collectent et génèrent énormément de données, pour créer des bibliothèques et des modèles d’intelligence artificielle appliquée à la robotique. On aimerait que Reachy devienne leur plate-forme de référence ». Vaste et ambitieux programme.Pollen RoboticsSAS créée en mai 2016Siège social à BordeauxEffectif : environ 30 personnesCA : n.c.

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