CEC Nouvelle-Aquitaine : « On demande aux entreprises de rédiger une feuille de route à visée régénérative » - Premium

La CEC, anciennement Convention des entreprises pour le climat, est une association d’intérêt général nationale. Comment est-elle née ? Elle est inspirée de la Convention citoyenne pour le climat. C’est une volonté de son fondateur, Eric Duverger - un ancien cadre de Michelin -, qui a regardé comment s’est déroulé ce processus. Ce qui l’a inspiré, c’est la notion d’intelligence collective qui réunit un certain nombre de citoyens avec une grande diversité de profils, tant territoriaux qu’en matière d’âge, de sexe, d’horizons sociaux, pour faire émerger des solutions. Il est parti du principe du triangle de l’inaction : un triangle dans lequel on retrouve trois acteurs, chacun à un sommet : l’Etat, les citoyens et les entreprises. Le constat, c’est qu’il est très difficile pour chacun de faire le premier pas vers la transition, car il y a une interdépendance très forte. Finalement, pour réussir certains changements il faut du pouvoir et du courage. Eric Duverger s’est demandé qui pourrait avoir ces deux notions, et c’est plutôt le monde économique, si on le met dans de bonnes conditions.Pourquoi ne pas la localiser davantage, à des échelles plus petites ? D’abord, la déclinaison territoriale est un choix initial de l’équipe, car on est plus autonome comme ça. C’est par ces territoires que l’on croit que la transition pourra se faire, en s’ancrant et en intégrant les parties prenantes de l’écosystème. On a d’abord décidé de garder les frontières administratives de la région - c’était bien pour le premier parcours, ce sera bien pour le deuxième, ça le sera certainement pour le troisième. Une telle échelle n’est pas si pratique pour mobiliser les dirigeants, nous devons aller encore plus finement à la taille d’un bassin de vie. Après, tout ceci est encore en réflexion…La mission de la CEC, selon ses termes, est de « rendre irrésistible la bascule de l’économie extractive vers l’économie régénérative avant 2030 ».La CEC se décline aujourd’hui en plusieurs structures sur le territoire, dont le nôtre, en Nouvelle-Aquitaine. Votre premier parcours s’est tenu de septembre à juin derniers, et a rassemblé 80 entreprises. Quels impératifs ont leurs dirigeants ? Que leur demandez-vous, lorsqu’ils participent ?Nous avons accompagné 78 entreprises, exactement, car deux ont eu des problèmes économiques avant de démarrer. Au démarrage, on met en avant des engagements assez forts : il n’y a pas de contrat, c’est un accord moral car nous sommes une association d’intérêt général, et pour pouvoir faire notre mission, nous avons besoin de preuves d’impact. Donc on leur demande de créer une feuille de route, de la rendre visible et accessible sur le site de la CEC ; et de livrer leur témoignage - ce qu’on appelle leur sursaut personnel. À la fin du premier parcours, 74 feuilles de route nous ont été rendues, et 68 dirigeants nous ont donné leur accord de publication car certains ont des contraintes actionnariales. C’est un beau résultat, une preuve de confiance et d’engagement des participants.« Connecter les dirigeants à leurs émotions »Vous parlez de sursaut personnel, le terme n’est pas anodin et sort du cadre habituel et formel du dirigeant d’entreprise… En quoi consiste les sessions de travail de la CEC ? On appelle notre méthodologie « tête cœur corps ». D’abord avec la tête, on échange avec les mots qu’ils ont l’habitude d’employer dans leur activité, on propose des conférences avec des scientifiques, sur l’écologie… Mais si on ne passe pas par le cœur à un moment, c’est difficile ensuite de mettre le corps en mouvement. Donc on constitue des sous-groupes que l’on appelle les camps de base, dans lesquels il y a deux représentants par entreprise, généralement son dirigeant et un responsable RSE, DAF, DRH… quelqu’un du comité de direction qui pourra porter la feuille de route avec le dirigeant, auprès du reste de la collectivité. Ces camps sont animés par deux professionnels, un coach et un facilitateur, et c’est le cœur de notre méthodologie : les amener à se livrer sur la façon dont ils ressentent les choses, ce qui leur a donné envie de se mettre en action… On va les connecter à leurs émotions, créer un collectif certes plus réduit mais extrêmement puissant. C’est là qu’ils vont travailler leur feuille de route, entrer dans le concret. Quels retours vous ont fait les participants au premier parcours néoaquitain ? Qu’il y a eu beaucoup d’intensité pendant les sessions. Six rendez-vous ça peut paraître court, pour autant c’est une parenthèse pour eux : on parle à chaque fois de deux jours et une soirée ensemble, on leur permet d’être en immersion, d’être concentrés sur ce qu’ils vivent avec le collectif. Il y a toujours, à un moment, un point de bascule - c’est là tout le sens de notre méthodologie. Un moment où ils se disent « Ça y est, je suis lancé dans cette transition ».Prochain parcours en décembreParmi les entreprises qui ont réalisé une feuille de route, on sait qu’il y a Eklo, qui a présenté la sienne cet été. Quelles autres sociétés vous ont marquée de par leur engagement ? Ah, je ne peux pas tout dévoiler avant la soirée ! (Rires) On peut citer en exemple Easy Cash, nous avons accompagné sa DG Anne-Catherine Péchinot, et Sophie Monnereau, sa directrice RSE. Dans leur feuille de route, elles ont inscrit un renoncement : dans les boutiques, ne plus vendre de produits neufs pour accessoiriser les objets de seconde main qui sont commercialisés, hormis lorsqu’ils permettent de garantir la durée de vie du produit. Par exemple, une coque de téléphone. Ce choix n’est pas anodin, car cela représente une marge assez importante de l’enseigne, qui fonctionne en plus en réseau de franchises et doit donc mener ce travail auprès de ses franchisés. En décembre, vous lancerez le deuxième parcours en Nouvelle-Aquitaine. Ça laisse peu de temps entre les deux sessions, aurez-vous autant d'entreprises participantes ? Oui, ça laisse peu de répit et en même temps on surfe sur la vague de ces premières feuilles de route. On fait notre possible pour aller chercher un peu plus de dirigeants en dehors de la Gironde et des Pyrénées-Atlantiques, on se mobilise à Limoges, à La Rochelle, à Angoulême… Le premier parcours était pour nous faire connaître, ce deuxième nous permettra de nous ancrer. Pour l’instant une trentaine d’organisations se sont manifestées, si on arrive à 60 ou 80 ce sera très bien. Quels sont les critères pour s’y inscrire ? Notre premier critère, c’est d’être assurément disponible pour toutes les sessions, dont les dates sont inscrites sur notre site internet. Ensuite, on demande une contribution financière car organiser cela représente un coût pour nous : on suggère entre 16.000 et 20.000 euros de cotisation, en fonction de la santé financière de l’entreprise et sa taille. Ça peut paraître onéreux mais il y a un système de défiscalisation à hauteur de 60%, donc ça revient à 6.400 euros pour un don de 16.000 euros. On est plutôt à l’aise avec ce principe !

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