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Les néoaquitains, leurs forêts et la filière bois : un sujet tout en paradoxes

Écosystème
mardi 18 juin 2024

Attachant à une forêt pourtant méconnue, usages à développer, enjeux climatiques… Pour la Fibois Nouvelle-Aquitaine, l'équation est complexe. Photo d'illustration : Adobe Stock

Quelle image les néo-aquitains ont de la forêt ? Et comment perçoivent-ils la collecte du bois ? Pour répondre à ces questions, la Fibois a fait réaliser une enquête d’opinion à l’échelle régionale. Quels enseignements en tirer et quelle communication délivrer, à la fois aux acteurs de la filière mais aussi aux autres parties prenantes, pouvoirs publics et population ? Sylvain Crapez et Jean-Marc Meyer, délégué général et président de la Fibois Nouvelle-Aquitaine, apportent des éléments d’éclairage.

Cette enquête n’est en soit pas une première. Déjà, en 2020, le sujet avait été abordé dans un précédent sondage régional. Mais les enseignements à en tirer avaient largement été éclipsés par la pandémie de Covid19 et ses conséquences. Reste que ce document apporte aujourd’hui des éléments de comparaison avec les résultats que commentent les responsables de la Fibois Nouvelle-Aquitaine. Réalisée en mars dernier par l’institut girondin Cohda, cette enquête a permis de compiler les réponses de 1.223 personnes, constituant « un panel représentatif de la population néo-aquitaine, en termes d’âge, genre et catégories socio-professionnelles », est-il souligné. « Elle met des paradoxes en évidence », reconnaissent en cœur Sylvain Crapez et Jean-Marc Meyer, respectivement délégué général et président de la Fibois Nouvelle-Aquitaine.

Un fort attachement à la forêt…

Ce sondage révèle cette année encore une fréquentation des forêts au cours des 12 derniers mois très élevée (94%) en légère hausse (+2% par rapport à 2020) et surtout plus régulière : un tiers des habitants s’y rend au moins une fois par semaine (+5 points). 97% des répondants se disent attachés aux bois et forêts de Nouvelle-Aquitaine et 93% sont conscients de leur fragilité. 99% estiment que ces espaces jouent un rôle clé pour l’environnement, la régulation du climat et l’amélioration de la qualité de l’air et de l’eau. Neuf sur dix définissent la forêt comme un réservoir de biodiversité.

… mais une forêt encore trop méconnue

Cet attachement n’empêche pas une forme de méconnaissance ou de manque d’information. 27% des répondants s’estiment bien informés (29% en 2020). Sept sur dix croient qu’il y a encore des forêts primaires dans la région, s’étonnent les dirigeants. Une même proportion pense que la surface de la forêt a baissé de 10% depuis 30 ans en France et seuls 12% des répondants savent qu’elle a en fait augmenté de 20%. Six sur dix déclarent qu’il y a une majorité de résineux en Nouvelle-Aquitaine, alors que les feuillus représentent 60% de la la surface forestière. Bien que 70% ont déjà entendu parlé de la gestion durable d’une forêt, ils ne sont que 15% à « très bien voir ce que c’est ». L’étude démontre également une ignorance face aux labels existants : 61% ne connaissent pas ou n’associent pas au bois les labels PEFC et FSC.

Le matériau bois plébiscité

Les néo-aquitains se disent attachés au matériau bois et semblent l’avoir adopté dans leur quotidien : 95% des répondants déclarent acheter des produits en bois (+6%). La provenance semble également séduire : 88% sont sensibles au bois français - régional ou local - et 48% se disent prêts à le payer plus cher. Et 82% considèrent l’utilisation du bois comme une énergie renouvelable et/ou à développer. À cet égard, la Fibois Nouvelle-Aquitaine vient de mettre en place un observatoire du bois-énergie, en partenariat avec l’Ademe.

La gestion de la forêt : un sujet clivant

Malgré l’attachement et ce plébiscite pour la forêt, sa gestion est encore source de controverse. La moitié des répondants marque ainsi sa désapprobation sur l’exploitation de la forêt par l’homme (+4%). Pour deux tiers d’entre eux, la forêt « s’apparente de plus en plus à l’agriculture industrielle » et 44% sont défavorables au recours à la mécanisation, s’étranglent Sylvain Crapez et Jean-Marc Meyer. « Les rôles et fonctions économiques sont décriés », poursuivent-ils : 64% pensent qu’exploiter du bois pour produire de l’énergie détruit les forêts et 52% se disent défavorables aux coupes rases. « Celles-ci ne représentent que 0,2% des coupes, mais elle permettent de créer de la volumétrie et donc les conditions pour des prix acceptables », recadre Sylvain Crapez.

Lancer un nouveau dialogue

« Cette enquête doit nous permettre de communiquer entre adhérents et d’engager le débat », estime-t-il. À quelle fin ? Créer les conditions pour établir l’utilité sociétale de la filière bois régionale. Une démarche considérée comme « notre véritable boussole » et qui repose sur trois piliers, analysent-ils : répondre aux besoins des humains, d’aujourd’hui et de demain, protéger et régénérer le vivant et enfin lutter contre le changement climatique. « Ce sondage va peut-être permettre de créer cette chaîne de valorisation du bois dans la société », espèrent-ils. « Il faut qualifier la ressource par rapport aux territoires », prévient le président : « on parle plutôt d’une hiérarchie d’usage, pas de conflits d’usage », complète son délégué général. Ensemble, ils estiment que la Fibois Nouvelle-Aquitaine poursuive ses actions d’information et de communication auprès du grand public, « en renouvelant les outils et méthodes, en créant de nouveaux points de jonction et de rencontres ». Initiatives culturelles, vis ma vie de bûcheron, meilleure visibilité des contenus pédagogiques ou encore cycles forêt/cinéma sont quelques-unes des pistes évoquées. L’interprofession régionale entend également poursuivre sa promotion autour des usages du bois, en mettant en œuvre en fin d’année un Pacte Bois & Biosourcés, « qui engagera de nombreux partenaires vers plus de bois dans la construction. Il faut inciter les promoteurs dans cette voie. Aujourd’hui on constate plutôt une stagnation ».

« Ce sondage doit aussi permettre d’asseoir des politiques publiques. Pour cela, la filière doit parler de façon plus cohérente », estime Jean-Marc Meyer. Aujourd’hui président de la Fibois à l’échelon néo-aquitain, il devrait d’ici peu de temps être porté la présidence nationale de l’interprofession. Et ainsi disposer d’un cadre nouveau pour exprimer ses convictions.

Aller plus loin - Jean-Marc Meyer (Fibois) : « On peut créer une économie circulaire à l’échelle du territoire »

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