Haria Blanca : Faire du blé au pays du maïs - Premium

Sur les hauteurs du village de Mugron, près des arènes, Benoit Cabannes contemple sa parcelle. Dans son système de rotation, le blé succède désormais au soja puis au tournesol. « Autrefois, il n’y avait que de la monoculture de maïs par ici », rappelle-t-il. Outre cette politique de diversification, l'exploitation familiale adhère aussi à six CUMA (coopérative d'utilisation de matériel agricole). Parmi elles, figure Haria Blanca, un outil de production de farine, destiné à relancer la filière du blé dans le département. Il aura fallu sept ans pour que l'idée germe, depuis le premier champ de blé semé à la construction de la minoterie inaugurée en septembre 2024. Un parcours long et semé d'embûches franchies avec succès. « Entre la guerre en Ukraine, l’augmentation des coûts de l'énergie et la crise du bio, le projet a pris plus de temps et coûté plus d’argent que prévu », concède Antoine Parisot, animateur de l’Alpad (association landaise pour la promotion de l’agriculture durable). Aujourd’hui, le lieu est opérationnel et reçoit le blé de dix-sept producteurs adhérents. Pénétrer un marché cadenassé Une fois récoltée, la céréale arrive sur place pour être effeuillée, puis triée par la taille et la forme. Stocké ensuite dans des cellules de bois de 20 tonnes chacune, le blé est prêt à passer sous la meule au rendement impressionnant de 130 kilos par heure. Puis, la farine T80 ou T110 sort ensachée dans des conditionnements de un, cinq ou vingt-cinq kilos. La farine 100% locale est alors prête à être vendue aux particuliers comme aux professionnels. C’est d’ailleurs vers cette dernière clientèle que la coopérative lorgne. Car pour rentabiliser l’investissement de 500.000 euros, la minoterie doit produire 300 tonnes de farine par an. « Cela représente la consommation annuelle de 15.000 personnes en pain », précise Antoine Parisot.La coopérative Haria Blanca souhaite produire 300 tonnes de farine par an. Crédit photo : Yannick Revel Pour l’instant, plusieurs boulangeries testent cette nouvelle farine locale qu’ils ne connaissent pas encore. Mais le marché n’est pas facile à pénétrer. « C’est un monde cadenassé par les minotiers qui enferment les boulangers avec des prêts », précise le représentant de l’Alpad. Néanmoins, l’espoir est de mise. « Une boulangerie qui tourne bien, environ 50 tonnes de farine de blé par an, il ne nous en faut pas beaucoup pour équilibrer le projet ». Se diversifier pour plus de stabilité Conseillère départementale en charge de l’agriculture et la forêt, Dominique Degos est convaincue de l’utilité du projet. « L’enjeu est important, chaque année le nombre d’exploitants diminue », déplore-t-elle. Selon elle, la solution passe par l'acte de consommation. « Tout achat que l’on peut faire sur le territoire est positif, c’est presque un acte de militantisme ». Dans ce cadre, le département encourage les acheteurs publics à passer par la plateforme Agrilocal 40. Ce portail numérique permet aux clients publics et privés de se fournir auprès de 242 producteurs du département. Sous son impulsion, des visites sont organisées, comme la semaine dernière avec la venue d’une vingtaine de chefs de cuisines scolaires à la minoterie.Benoit Cabannes, agriculteur à Mugron, cultive 17 hectares de blé sur ses 110 hectares de terres cultivées. Crédit photo : Yannick Revel Outre le pain et les cantines scolaires, la farine trouve aussi d’autres débouchés. Sur l'exploitation des frères Cabannes à Mugron, une unité de production de pâtes a vu le jour. Spécialiste du canard, la famille a souhaité s’orienter vers un produit végétal et s’est lancée dans la fabrication de pâtes locales, à base de blé semé, récolté et transformé à Mugron. Toujours dans un souci de diversification, afin d’assurer un revenu stable aux agriculteurs, la minoterie devrait rapidement recevoir d’autres types de céréales afin de moudre également des farines d’épeautre, de sarrasin…

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