Crise du logement : en Gironde, les professionnels se rassemblent pour relancer la production - Premium

Comment est née l’Union pour le logement en Gironde ? Elle est née de la situation actuelle, que nous traversons dans les métiers de l’immobilier. Nous, professionnels, avons lancé plusieurs tentatives d’alerte, et cela fait trois ans que l’on tire la sonnette d’alarme. On a essayé plusieurs choses déjà : alerter via les syndicats, qui finalement sont assez inaudibles auprès des instances publiques ; créer une alliance il y a un an et demi et rassembler des producteurs de logements pour envoyer un message fort à nos politiques… On leur a dit, « on va droit dans le mur et on commence à klaxonner ». Aujourd’hui, on prend le mur en pleine face. Il faut savoir que nous voyons la production à 18 mois, tandis que les pouvoirs publics constatent celle qui a eu lieu il y a 12 mois. Donc concrètement, on a un décalage de deux ans. L’objectif est de voir comment on répare la voiture pour contourner le mur. Est-il encore possible de contourner ce mur, justement ? On peut à tout moment, je pense. La seule chose, et c’est un peu le mantra de l’ULG, c’est qu’au vu de toutes les difficultés que l’on a, nous devons nous réunir autour de ce qui nous rapproche plutôt que de ce qui nous divise. C’est-à-dire mettre de côté toute notion partisane, dogmatique ; qu’elle soit économique, sociale, environnementale. C’est simplement remettre un peu d’intelligence et de logique dans ce que l’on fait.Imaginer et tester En quoi votre initiative est-elle différente des précédentes ? Eh bien, l’ULG a la particularité de ne pas comprendre que des producteurs du logement, qui pourraient justement avoir une vision très partisane de l’immobilier. Nous comptons l’ARIA, l’association régionale de l’ingénierie d’Aquitaine, l’Ordre régional des géomètres-experts, la FFB bien sûr [ndlr, Fédération française du bâtiment de Gironde] et son Pôle habitat, l’Union nationale des aménageurs, la FPI [ndlr, Fédération des promoteurs immobiliers], la FNAIM 33 [ndlr, Fédération nationale de l’immobilier], le Syndicat national de la rénovation et les notaires de Gironde. Je pense que ces derniers ne sont pas anodins, car il est assez rare qu’ils participent à ce genre d’union - ce qui montre la gravité de la crise que l’on traverse. Nous connaissons toujours le même seuil migratoire, 18.000 nouveaux habitants chaque année, mais la production a chuté de 30 à 35%. Lorsqu’on dit « il va y avoir un problème à terme », le terme, c’est l’année prochaine. Pourquoi pensez-vous pouvoir faire changer les choses, aujourd’hui ? Car nous changeons de méthode. Avant, on était plutôt sur une logique de syndicats en opposition, ou avec une forte demande partisane. Aujourd’hui, on va prendre des sujets et les aborder de façon trimestrielle, en étant force de proposition auprès des pouvoirs publics - administration et politiques -, c’est-à-dire nos homologues dans la production de logements. Ce que l’on souhaite, c’est être force de proposition, mais aussi être des démonstrateurs de ces propositions. Non seulement avoir des idées, et proposer aux pouvoirs publics de faire des coups d’essai pour essayer de fluidifier la production de logements.La ZAN, l’un des sujets majeurs ? Vous expliquez vouloir mettre de côté toute notion dogmatique, notamment sur l’environnement. Faites-vous, entre autres, allusion à la ZAN - zéro artificialisation nette des sols - à laquelle la majorité des professionnels semblent être opposés ? Je vais parler en mon nom. Personnellement, je suis aménageur et je fais des lotissements, donc je suis le premier visé par la ZAN. Chez nous en Gironde, nous n’avons pas de bassin industriel et des friches à tour de bras comme dans le nord de la France. Et quand j’ai vu arriver la ZAN, je me suis demandé ce qu’était cette usine à gaz, car on n’avait pas besoin de ça. Aujourd’hui j’ai mûri, et lorsqu’on consomme du foncier on ne le fait qu’une fois - nous n’avons pas de seconde chance de l’artificialiser -, donc il est important de le faire le mieux possible. En cela, je suis un pro ZAN. Consommer des terrains à bâtir sur la base de 1.000m², aujourd’hui, mes mots vont être forts : c’est criminel. Mais qu’on nous l’impose, ce n’est pas criminel : c’est illogique. Et c’est ce qui se passe aujourd’hui. On a une telle dissonance entre la politique nationale qui nous dit « vous consommerez moins », et celle locale qui dit « je ne veux pas que vous consommiez différemment d’hier » qu’on est un peu pris entre deux feux complètement contradictoires. Qui vous oblige aujourd’hui à consommer ces 1.000m² pour des terrains à bâtir ? Ce sont les chartes communales. Ça n’existe pas dans le code de l'urbanisme, et d’ailleurs ça a été condamné par le tribunal administratif car ça ne peut être imposé. Vous avez une double peine : il y a ce que dit le PLU, qui transcrit ce que souhaitent les élus ; et en deuxième lame, la charte communale qui vient ajouter des contraintes. Et souvent, ce sont des contraintes de densité. Le PLU, le préfet a l'œil dessus, la charte communale, non. Et quasiment toutes les communes de Bordeaux Métropoles ont une charte communale.Renforcer le dialogue et fluidifier les processusCe sujet entre dans l’un des trois axes majeurs de l’ULG, qui est la simplification des lourdeurs administratives et réglementaires. Qu’est-il important de faire évoluer d’autre, selon vous ? Nous avons la volonté d’être plus en lien avec les services qui instruisent les dossiers. Souvent il y a tellement d’allers-retours qu’ils ont un impact négatif, notamment sur le temps de travail des architectes qui font et refont les dossiers. Cela participe à la fragilisation économique pour tous les acteurs de la chaîne. En clair, cette crise du logement est double - crise de l’offre et de la demande. On arrivera à pallier la problématique des prix quand on aura un choc de l’offre, qui se fait par une accessibilité plus simple au foncier constructible et surtout par un gain de temps en matière d’instruction. À la Métropole, vous avez des pré-instructions qui varient entre six et neuf mois, et qui n’existent pas dans le code de l’urbanisme. On nous demande des produits aboutis pour des opérations que l’on n’est pas sûr de faire. La flambée de l’immobilier d’hier nous a contraints à tout accepter, et aujourd’hui le travail qu’il nous reste à faire, c’est aller voir les pouvoirs publics avec un contenu que nous avons décidé de leur proposer, pour changer le processus actuel.

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