Législatives : « ça s’est encore compliqué » (François Perrin, Medef Nouvelle-Aquitaine) - Premium

Quelle a été votre première réaction à la découverte des résultats dimanche soir ?Personne n’attendait ces résultats-là. Aucune majorité simple ni même relative n’émerge. On a d’un côté Jean-Luc Mélenchon qui dit « le programme LFI, tout le programme, rien que le programme », et Raphaël Glucksmann qui appelle, de par son expérience au parlement européen, à chercher des compromis. Tout ça ne sent pas l’unité. À titre personnel, ce qui me désole un peu, c’est que dans les entreprises on a quand même une culture du dialogue social. Et dans tous les organismes paritaires aussi. Le fait est qu'il y a des gens qui, là, disent « non, on ne veut pas discuter ». Si on regarde ce qui s’est passé par exemple en Allemagne, il ne faut pas l’oublier. Alors, ils mettent des mois à discuter, d’accord. Mais une fois qu’ils ont un accord, ils arrivent à gouverner. Et ce n’est pas forcément faire la révolution, mais au moins, pour le bien du pays, les gens sont capables de s’entendre [ndlr, la coalition au pouvoir réunit socio-démocrates, écologistes et libéraux]. En attendant, ce n’était pas simple avant les résultats et ça s'est encore complexifié !Une coalition, c'est la seule solution ?Il y a des choses qui sont de l'ordre réglementaire, d’autres de l'ordre de la loi. Donc un Premier ministre qui serait nommé pourrait passer un certain nombre de choses par décret, mais il serait quand même très limité, parce qu'il y a énormément de choses dans les programmes qui sont du ressort de la loi. La loi, ça se vote, d'accord ? Il n'y a pas aujourd'hui, sans coalition, un bloc qui peut espérer tout passer au 49-3. À un moment, il va falloir qu’ils discutent et trouvent une solution, sinon ça ne va pas beaucoup bouger. Nous, Medef, continuons à dire qu'on a besoin le plus possible de stabilité, de ne pas avoir de matraquage fiscal. La politique de l'offre qui a été mise en place sur les sept ou huit dernières années, il ne faut pas oublier que ça a fonctionné. On a de la croissance, on a de la création d'emplois, on a de la réindustrialisation. On avait des grands projets industriels d'ampleur internationale qui avaient choisi de s'implanter en France. Ne cassons pas tout.« Le SMIC à 1.600 euros c’est intenable »L’un des sujets concerne une possible abrogation de la réforme des retraites. Est-ce possible ?Je ne suis pas un spécialiste. Néanmoins, il me semble que Gabriel Attal avait la possibilité de mettre la réforme en place par décret et qu’il a décidé de ne pas publier ce décret. Donc ce serait possible pour quelqu’un, de modifier cette réforme par décret. Mais c’est une question de compétitivité. On a quasiment l'intégralité des pays du G7 et de l’OCDE qui sont sur une retraite à 67 ans déjà.Et le SMIC à 1.600 euros ?Augmenter le SMIC de 15%, c’est intenable, ce n’est même pas une question. On a, dans la même séquence, quelqu’un qui nous dit qu’il faut arrêter de faire des aides sur les bas salaires, qu’on va augmenter le SMIC mais, comme on sait que les entreprises ne peuvent pas payer, en tout cas les très petites et PME, alors on va mettre en place des mécanismes des compensation. Sans parler de l’impact sur les finances publiques. Comme toutes les aides sont calculées en base SMIC, vous faites rentrer mécaniquement, dans l’assiette des aides, des salaires qui n’y étaient pas. Et une personne qui était à 110% du SMIC, parce qu’elle avait de l’ancienneté, ou un poste plus qualifié, va demander elle aussi à être augmentée de la même façon. Quel impact sur la grille des salaires ? Et je rappelle que l’EBE [ndlr, excédent brut d’exploitation] moyen des entreprises en France, selon les sources INSEE, c’est 15 à 20%. On est quand même une économie tertiaire. Dans des boîtes où les salaires pèsent 60 à 70% de la charge, passer 10 ou 15 points supplémentaires… Ayez en tête toutes les sociétés qui sont en marché. Tous les hôpitaux, qui ont déjà du mal à boucler leur budget, avec pas mal de salariés dans tout ce qui est médico-social, sécurité… je ne sais pas comment ils feraient. Les collectivités aussi sont concernées.Y a-t-il des sujets typiquement neoaquitains à faire remonter aux députés du territoire ?Je ne crois pas qu'il y ait de spécificité. On vient de vivre deux campagnes électorales, deux scrutins, qui génèrent de l’attentisme. Et le résultat aujourd’hui amplifie cet attentisme. Les entreprises, que ce soit pour embaucher ou investir, ont besoin de sécurité et de vision à long terme. Selon un sondage Medef auprès de ses adhérents, 60% disent « on avait des projets, on les décale ». Ça ne veut pas dire qu’ils ne les feront pas, mais ils attendent d’avoir de la visibilité. Un chef d'entreprise qui investit dans un outil productif, il le fait pour 15 ans. Il faut connaître le cadre et qu’il soit favorable à l’entreprise, au sens large, avec ses salariés. N’oublions pas que sans création de valeur, tout s’arrête. Il faut qu'on continue à créer de la valeur, à payer les impôts, parce que c'est ça qui fera qu'on y arrivera, tous ensemble.

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