Biomim'gel prépare son industrialisation - Premium

Le parcours de Biomim’gel débute dans les laboratoires de l’UPPA et du CNRS. « Nous avons commencé à travailler sur notre technologie il y a plus de dix ans, au départ en partenariat avec un acteur de la cosmétique, raconte Laurent Billon, professeur des universités et directeur scientifique de la startup. Plusieurs types de financement, publics comme privés, nous ont permis de mettre en place plusieurs familles de brevets autour de la technologie des microgels ». En 2021, ceux-ci décrochent le prix de l’innovation académique des Cosmetic Victories, décerné par le pôle de compétitivité Cosmetic Valley. À ce moment, l’idée d’une application entrepreneuriale commence à émerger. « Ce prix a été un déclencheur en nous montrant que notre technologie avait un véritable potentiel économique », ajoute Laurent Billon. En 2022, Pierre Marcasuzaa, directeur général, rejoint le projet et pousse son développement entrepreneurial. « Nous étions déjà en contact avec Chrysa-link, l'incubateur de start-up de la SATT [Société d'accélération du transfert de technologies] Aquitaine Science Transfert. En février 2023, nous avons intégré l’incubateur pour une durée de 18 mois, pour maturer le projet d’un point de vue entrepreneurial, élaborer un business plan, étudier le marché… » Après cette première incubation, Biomim’gel intègre Hélioparc et, début 2024, le nouvel incubateur Greenov, consacré à la transition écologique. « 99% d'eau, notre ingrédient, le parfum et c'est tout »« Notre technologie est inspirée du fonctionnement des éponges, explique Laurent Billon. Nous avons développé une micro-éponge, une particule synthétisée et stabilisée dans l’eau, et qui, dans l’eau, se gonfle. Elle a la particularité de pouvoir répondre à des variations de son milieu, et de se contracter selon ces variations. Et se contractant, si elle a stocké un actif, elle peut le relâcher. Elle a aussi une propriété de stabilisation des émulsions. » Des propriétés qui permettent de simplifier des formulations complexes. Pierre Marcasuzaa ouvre, pour en faire la démonstration, un petit pot rempli d’une crème blanche. « Actuellement, une crème hydratante nécessite de multiples additifs pour assurer sa stabilité et ses propriétés. Avec seulement 1 % de notre ingrédient, on peut obtenir une formule composée à parts égales d’eau et d’huile, sans solvants, tensioactifs ni épaississants », illustre-t-il. Puis il pointe vers un flacon pulvérisateur : « On peut aussi s’en servir pour stabiliser un parfum dans de l’eau. Dans ce flacon, il y a 99% d’eau, notre ingrédient, le parfum, et c’est tout ».À lire également - Hélioparc : « La greentech sera la filière d’excellence des années qui viennent » C’est dans cette simplicité que réside l’enjeu environnemental qui a valu à la startup d’intégrer Greenov. « Nos microgels permettent de réduire drastiquement l’empreinte carbone des formulations. Par exemple, dans un parfum classique, il y a dix fois plus de tensioactifs utilisés pour stabiliser le produit que de parfum en lui-même. Avec notre solution, ce ratio passe à un pour un, détaille Laurent Billon. Sachant que la plupart des formulations cosmétiques finissent dans l’environnement… » Biomim’gel a décliné sa technologie en trois gammes : Skin’gel, conçue pour les applications cosmétiques et dermatologiques ; Muco’gel, adaptée aux surfaces humides, notamment dans la santé animale ou buccale, et Bio’gel, fabriquée à partir de matières premières biosourcées. Objectif industrialisation « On a deux façons de valoriser cette technologie, considère Laurent Billon. La première, c’est de travailler avec un partenaire en BtoB. L’autre, c’est de produire nous-mêmes ». Pour la première approche, les installations actuelles de Biomim’gel permettent déjà à la startup de développer des applications et de produire des échantillons pour ses clients. « Ce n’est pas négligeable, on veut aussi vendre ce savoir-faire et notre capacité à faire du co-développement pour adapter nos microgels à leurs besoins spécifiques, remarque Pierre Marcasuzaa. Mais cette étape est plus une accroche avec le client. Notre objectif est que la production pour le compte de nos clients représente la part principale de notre chiffre d’affaires ». Pour cela, Biomim’gel devra grandir. Première étape : l’installation à Chemstart’up, la plateforme dédiée à l’innovation du bassin de Lacq. « Nous y disposerons d’un bioréacteur, qui nous permettra de produire beaucoup plus », explique le directeur général. « Dans la cosmétique, entre le moment où un client choisit de développer une nouvelle formulation et sa mise sur le marché, il faut compter entre 18 mois et 2 ans, ajoute Pierre Marcasuzaa. Cela correspond au délai de notre installation sur ChemStart’up et du lancement de notre production en 2026-2027. » « On a participé au salon Cosmétique 360, qui nous a permis de rencontrer beaucoup d’acteurs du secteur, raconte Laurent Billon. On a ressenti un vrai intérêt pour notre technologie, et signé quelques contrats ». Sans pouvoir dévoiler de noms, accords de confidentialité obligent, les deux entrepreneurs évoquent des clients allant « du grand groupe industriel a de petites startups comme nous. » Si, à l’heure actuelle, leur développement commercial cible le secteur de la cosmétique, il n’a pas vocation à s’y limiter, précisent-ils toutefois. « On peut viser tous les marchés dans lesquels des principes actifs sont intégrés, assure Pierre Marcasuzaa. La pharmacie cutanée, la dermocosmétique aussi… ce qui va varier, c’est la nature du principe actif, et les autorisations de mise sur le marché, mais ça, ce sera au client de le mettre en place. Il y a d’autres marchés, le housecare, les parfums d’intérieur, les produits anti-moustiques… que nous n’avons pour l’instant pas explorés, mais qui sont des possibilités ».À lire également - Lacq : m2i veut faire passer ses phéromones de synthèse « à une autre échelle » Contrairement à de nombreuses startups, Biomim’gel ne vise pas, à terme, une revente de sa technologie à un grand groupe. « Dans le domaine de la cosmétique, les grands acteurs ne produisent pas eux-mêmes leurs ingrédients. Notre modèle repose sur le développement et la commercialisation directe de nos solutions », explique Laurent Billon. Pour cela, l’entreprise table sur une montée en puissance progressive, en commençant par des productions à petite échelle pour sécuriser les premières ventes.De l'amorçage à la série ALe financement de cette croissance repose sur plusieurs levées de fonds planifiées. La première, prévue pour début 2025, sera une levée d’amorçage destinée à consolider les équipes et à finaliser les démarches administratives. Une seconde levée, de type seed, est envisagée pour 2026, afin de financer l’installation à ChemStart’up. Enfin, une levée de type Série A, autour de 2029-2030, permettra d’assurer l’industrialisation à grande échelle. L’entreprise affiche également une volonté d’ancrage local, avec une préférence pour maintenir ses activités dans le bassin de Lacq. « Le bassin de Lacq combine un écosystème industriel dynamique et une expertise locale en chimie. Cela correspond parfaitement à nos besoins », conclut Pierre Marcasuzaa.

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