Le miscanthus, solution vertueuse de demain ?
Les premiers plans de miscanthus ont été plantés près de Tarbes. Crédits : Franck Saint-Girons
Il y a quelques semaines, il avait remporté l'appel à projet de Pulseo : « À point nommé ». En septembre, Franck Saint-Girons, l'un des quatre associés de l’entreprise Territori, était venu à Dax pitcher son idée : celle d'implanter du miscanthus ici, dans les Landes. Cette plante venue d'Asie, aussi appelée « herbe à éléphant », pourrait servir, selon lui, de « palliatif à la pollution ».
C'est une idée qui a commencé à prendre racine il y a quelque temps déjà : celle d'implanter du miscanthus dans les Landes. Cette plante venue d'Asie et jusqu'ici peu connue en Europe, serait peu coûteuse en eau et capable de stocker des métaux lourds. Des vertus intéressantes donc, même si le botaniste de l'équipe en charge du projet, Marc Saubion, avait au départ émis quelques réserves, précisant qu'il s'agit d'une plante relativement invasive. Une problématique qui a pu être balayée, après une période de recherches. « L'Inrae a travaillé sur un type de miscanthus qui est stérile - sauf erreur humaine - et donc moins invasif, mais avec des propriétés toujours intéressantes », affirme t-il.
À la tête de ce projet autour du miscanthus, Franck Saint-Girons, le gérant et l'un des associés de la Société coopérative et participative Territori. « Nous sommes quatre à avoir intégré ce bureau d'études, répartis sur trois départements et deux régions, entre les Landes, les Hautes-Pyrénées et la Haute-Garonne », détaille-t-il. Près de Tarbes, où est installé le siège social, des champs de miscanthus sont d'ores et déjà sortis de terre. « Nous voulons reproduire ces cultures dans les Landes, mais en adaptant les propriétés aux problématiques du territoire. » Alors, quelles sont-elles et que permet concrètement le miscanthus ? Eléments de réponse avec Franck Saint-Girons.
Contrebalancer les effets des phytosanitaires
Créée en 2012, la Société coopérative et participative (Scop) Territori a eu avant tout pour vocation la gestion différenciée, « c'est-à-dire l'utilisation du végétal dans sa grande hétérogénéité », comme l'explique son gérant. « Nous sommes partis de l'idée que le végétal peut être une réponse à de nombreuses problématiques. L'idée est qu'il vienne contrebalancer tous les effets néfastes des produits phytosanitaires. » Au sein de l'équipe, quatre associés qui sont aussi salariés et dont les compétences se complètent. « Nous avons deux collègues qui sont ingénieurs/paysagistes, notamment, un collègue qui est botaniste mais qui est aussi agronome de formation et qui travaille sur tout ce qui est ingénierie. Et moi qui suis docteur en aménagement du territoire. »
Le bureau d'études évolue dans quatre domaines. « Nous travaillons sur des projets de maîtrise d'œuvre, c'est-à-dire aménagement paysager ou urbain. Ce sont des activités qui représentent une grosse partie de notre chiffre d'affaires. Nous faisons aussi des diagnostics phytosanitaires, avec quelques formations autour des thématiques zéro phyto, notamment », égrène le gérant. « On travaille aussi sur des études paysagères et urbaines. Et enfin le dernier domaine c'est celui du développement, de l'animation et la création de projets de territoire. » C'est dans ce cadre que l'équipe a été amenée à faire sortir de terre des cultures de miscanthus.
« Travailler sur de la synergie territoriale »
Après plusieurs déménagements, l'antenne landaise de Territori a finalement pris ses quartiers à Dax. « Nous cherchions un endroit où nous pouvions avoir des synergies et ne plus être seuls, à développer notre projet dans notre bureau. C'est dans ce cadre que nous avons participé au concours de Pulseo : "À point nommé" et remporté le premier prix », raconte Franck Saint-Girons. « Si le directeur de l'incubateur du Grand Dax a été séduit par notre projet, c'est aussi parce qu'il n'est plus tout à fait à l'état d'embryon. Nous avons déjà commencé à le développer dans les Hautes-Pyrénées. » Un concept et une filière que l'équipe de la Scop Territori veulent « adapter à ce nouveau territoire », comme le précise le gérant. « L'idée n'est pas de faire un copier/coller de ce qui a été fait près de Tarbes, mais bien de prendre en compte les enjeux économiques locaux et environnementaux, pour que l'implantation du miscanthus soit la plus adaptée possible. On veut travailler sur de la synergie territoriale, en faisant en sorte que cette filière ne vienne pas en concurrence d'une autre, mais bien en complément », affirme -t-il.
Plus concrètement, le projet repose sur l'idée que le miscanthus devienne une réponse à la pollution et essentiellement la pollution liée aux phytosanitaires. « Nous avons commencé à faire des recherches en 2017, pour trouver une plante qui aurait une culture bas intrants. L'idée était de pouvoir planter des végétaux sur des puits de captage d'eau potable, sans que ces derniers altèrent la qualité de l'eau. Il nous fallait donc une culture sans produits chimiques. » Alors pourquoi le miscanthus ? Pour Franck Saint-Girons, d'abord parce que c'est une plante pérenne. « Il s'agit d'un rhizome qu'on met dans le sol. Une fois planté, pendant 20 à 25 années, il va produire. Il est possible de le récolter tous les ans et ensuite, il se régénère et repousse, sans apport d'intrants donc. » Derrière, une partie des récoltes peut être utilisée pour tout ce qui est paillage. « Cette production va ainsi lutter contre l'évapo-transpiration. De plus, son PH est neutre et va maintenir la qualité intrinsèque du sol. » Autre utilisation de ce paillage : de la litière animale. « Cette plante offre ainsi dans son panel de débouchés, plus de possibilités et de filières derrière », évalue Franck Saint-Girons.
Un projet dont les contours semblent définis, même si tout reste à faire. Aujourd'hui, l'équipe de Territori prévoit d'aller à la rencontre des syndicats locaux autour de l'eau, pour leur présenter le projet. « Nous allons leur montrer ce qui a déjà été fait et voir avec eux si ce type de culture peut les intéresser. Nous allons également rencontrer la Chambre d'Agriculture, qui travaille sur ces éléments et voir pour implanter notre filière à deux endroits du département. » Autre axe de travail dans les semaines et les mois à venir : aller présenter la filière aux acteurs locaux, avec cette plante qui pourra venir en complément du maïs. « Évidemment, nous ne venons pas remplacer une filière mais bien compléter l'existant et notre but est de devenir un acteur important sur le département. Les mois à venir votre être déterminants pour nous. »
Organisée vendredi soir à Dax, la troisième édition de l'appel à projets « À point nommé » a récompensé le projet porté par la société tarbaise Territori autour du miscanthus - crédit Pulseo
Territori
Création en 2012
Siège social : Tarbes
Effectif : 4 salariés
CA en 2022 : 300.000 €