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Patrick Seguin : « Ce côté anxiogène ne peut pas durer »

Écosystème
mercredi 19 février 2025

Patrick Seguin, président de la CCI Bordeaux Gironde. Crédit : DM

Patrick Seguin avait la mine des mauvais jours ce matin, lors de son point de conjoncture. Alors que se profile le temps des promesses électorales, le président de la CCI Bordeaux Gironde est prêt à taper du poing et veut des actes.

« Notre économie va mal, on doit faire face à la montée des procédures et les tribunaux de commerce n’arrivent pas à tout traiter, ils sont à genoux. » Les yeux sur les chiffres, Patrick Seguin, président de la Chambre de commerce et d’industrie Bordeaux Gironde, fait grise mine. Après une hausse de 50% en 2023, les ouvertures de procédures ont augmenté de 36% l’an passé, soit 2.122 dossiers. Et les liquidations judiciaires, qui avaient suivi la même courbe en 2023 (671, +49% vs 2022), ont dépassé le millier en 2024 (1.026), avec une augmentation de 35%. « C’est une problématique très lourde et ça ne va pas changer dans les mois qui viennent. » Les secteurs du bâtiment et des cafés hôtels restaurants sont particulièrement en souffrance même si, concernant les CHR, la fin 2024 a constitué une embellie. « Il y a un effondrement de la confiance depuis la dissolution, les gens n’y croient plus. Nous-même, CCI, n’avons plus d’interlocuteur au gouvernement. Localement, tout le monde est perdu. Ce côté anxiogène ne peut pas durer, sinon il y aura un rejet complet du système politique et les gens vont se tourner vers la société civile. »

Trois obsessions

Alors que, pour le commerce, les derniers soldes n’ont pas bien fonctionné, Patrick Seguin rappelle les trois « obsessions » d’une CCI. Tout d’abord être allié de proximité des commerçants. « À ce titre, nous avons créé une task force, pilotée par Hervé Turpin, qui fait du porte-à-porte avec les commerçants. Pour écouter leurs difficultés et proposer de l’accompagnement, des programmes de formation… Il y a ceux qui bougeront, les autres tant pis pour eux. » Autre sujet prioritaire : « anticiper les difficultés de demain ». À ce titre, Patrick Seguin a récemment été nommé président des Centres d’information et de prévention (environ 70 en France, dont deux en Gironde). Une responsabilité au travers de laquelle il compte généraliser à tout le territoire national la plateforme quipeutaidermaboite.fr, initiative expérimentale de la CCI Bordeaux Gironde.

Enfin, il entend « construire une stratégie d’influence vis-à-vis des élus, locaux, régionaux et nationaux. » Si, localement, le contact et les échanges directs avec les élus se passent globalement bien, indique-t-il, le président Seguin appelle les élus à renforcer leur dialogue avec le monde économique, en amont des projets. « Les prochaines élections municipales arrivent, on va commencer à entendre des promesses. Nous, on veut des actes. Notre parti, c’est l’économie et l’emploi, pas la politique. On va taper un peu plus du poing sur la table. » En matière de concertation, il évoque notamment le prochain réaménagement des allées de Tourny. « Nous aurons une réunion le 7 mars prochain avec la mairie et Bordeaux Métropole. Mais aussi avec les commerçants et restaurateurs, qui ont fait des propositions avec un architecte. C’est intéressant d’avoir leur vision. »

Les paquebots, la sécurité, l’EPR2… sujets d’inquiétude

Concernant l’accostage des paquebots dans le centre-ville de Bordeaux, sur la rive gauche, Patrick Seguin navigue à vue. « C’est un sujet lancé par le maire de Bordeaux, mais qui relève de la compétence de la Métropole », rappelle-t-il. Laquelle collectivité a demandé au Grand Port Maritime de Bordeaux de réaliser une étude technico-financière sur le coût et l'impact de l'installation d'alimentations électriques à quai, qui seront obligatoires à horizon 2030. « En fonction du lieu où l'on installe ces équipements, quel sera l’impact pour le commerce de centre-ville ? », questionne le président. Lequel évoque la possibilité de réaliser une contre-étude, pour comparer. Et rappelle qu’à ce jour, l’escale d’un paquebot de croisière dans le centre, sur la rive gauche, génère en moyenne 330.000 euros de retombées économiques. En outre, la CCI Bordeaux a demandé à réintégrer l’association Cruise Bordeaux (ex-Bordeaux Escales de Croisière) aux côtés des croisiéristes, « pour peser sur les décisions ».

Concernant la sécurité, le président tire la sonnette d’alarme. « On constate de gros risques dans certains quartiers comme Grand Parc, les Aubiers, la Grosse Cloche. Des élèves des écoles pilotées par la CCI se font agresser, racketter. Le bâtiment emblématique de la Place de Bourse, qui n'est pas éclairée toute la nuit, a été dégradé récemment. J’ai demandé à la mairie d’agir. Ils ont répondu favorablement. Peut-être en s’inspirant des expérimentations menées à Eysines et au Bouscat. » (ndlr : télégestion des éclairages publics et télédétection de présence).

L’été dernier, le monde économique local estimait avoir « une longueur d’avance » dans la course pour accueillir à Blaye l’installation d’une paire de réacteurs EPR2. Il appelle à la vigilance et à ne pas se démobiliser. Et de préciser que si le site girondin était retenu, cette décision s’accompagnerait d’un plan de modernisation de l’actuelle centrale nucléaire du blayais pour 40 ans supplémentaires. « Mais si on n’est pas choisi, l’actuelle centrale de Blaye sera condamnée. »

Wine Paris… et le Parc des Expositions de Bordeaux
Le salon Wine Paris (organisé par la société Vinexposium dont la CCI Bordeaux Gironde est actionnaire à 50%), qui s’est tenu du 10 au 12 février derniers, « a été extraordinaire », savoure le président le CCI. 52.622 visiteurs professionnels, dont 40% internationaux issus de 54 pays. « C’est une affluence record. Mais ça n’est possible qu’avec un équipement comme le Parc des Expositions de la Porte de Versailles. Ici, à Bordeaux, le Parc des Expositions est dans un état de délabrement qui ne permet plus d’organiser ce genre d’évènement. Heureusement que nous sommes allées à Paris, sinon Vinexpo France n’existerait plus. » Et de rappeler que Bordeaux Métropole a décidé de lancer un appel à manifestation d’intérêt pour identifier un groupement de partenaires (constructeurs, architectes, financiers) pour mener la démolition-reconstruction du vénérable Parc des Expositions de Bordeaux, qui accuse son demi-siècle d’existence. « Si vous avez l’outil, conclut-il, vous existez sur la scène mondiale et vous pouvez attirer des évènements. »

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