Qu'est-ce que la donation-partage transgénérationnelle ?
Hervé Blanchard est gérant de fortune chez Meeschaert Gestion Privée.
De nombreux dispositifs existent en France pour anticiper sa transmission dans un cadre fiscal avantageux. On peut citer notamment les techniques de démembrement de propriété, une rédaction adaptée des clauses bénéficiaires de contrats d’assurance-vie ou bien encore la mise en place d’un pacte Dutreil sur une participation. Mais avec une espérance de vie qui augmente, la mise en œuvre d’un saut de génération consistant à transmettre directement des grands-parents aux petits enfants est une solution particulièrement intéressante.
La donation-partage transgénérationnelle
Une donation-partage transgénérationnelle permet de réaliser un partage d’une partie de ses biens au profit de descendants de degrés différents. Des enfants de la deuxième génération consentent alors à ce que leurs propres enfants, la génération 3, bénéficient de la donation en leur lieu et place. Le principe est que chaque branche reçoit un lot de même valeur mais avec une répartition entre les générations qui peut être différente d’une branche à l’autre.
L’opération est fiscalement très favorable puisqu’une donation à la troisième génération bénéficie de l’abattement fiscal de 31.865 euros par petit-enfant ainsi que plusieurs fois de la progressivité du barème des droits. Elle évite surtout une double taxation lorsque la deuxième génération réfléchit elle aussi à transmettre son patrimoine à ses enfants.
Pour autant, certaines familles n’ont pas pu mettre en œuvre de telles modalités de transmission. Soit parce qu’elles n’étaient pas possibles jusqu’en 2006, soit parce qu’elles n’étaient pas souhaitées compte tenu de l’âge des petits-enfants, soit simplement par choix, le niveau de ressources et de patrimoine de certains enfants ne le permettant pas.
Réintégrer une donation passée dans une nouvelle donation
Pour les enfants de la deuxième génération qui se posent aujourd’hui la question de transmettre le patrimoine reçu de leurs parents, le législateur propose une solution particulièrement favorable. Celle-ci consiste à incorporer, dans une nouvelle donation-partage transgénérationnelle, la donation historique en vue de transmettre aux petits-enfants des biens initialement attribués aux enfants.
• L’incorporation de la donation passée peut-être totale ou partielle, en pleine propriété ou en nue-propriété et peut concerner toutes les branches ou une seule d’entre elles. Chaque enfant a donc le choix de conserver les biens historiquement reçus ou de les « laisser passer » à ses enfants.
• L’opération doit se faire en présence des grands-parents et nécessitent l’accord de tous les membres de la deuxième génération même de ceux qui souhaitent conserver à leur niveau les biens reçus.
• Il faut enfin que le bien donné à l’origine soit encore présent dans le patrimoine des enfants ou, s’il a été vendu, que l’on puisse en retracer son remploi.
Mais c’est en matière de fiscalité que l’opération est particulièrement intéressante avec deux cas de figure :
• si la donation réincorporée date de moins de 15 ans, les droits de donation s’appliquent bien entre les grands-parents et les petits-enfants mais avec l’avantage de pouvoir déduire les droits acquittés lors de la première donation ;
• et si la donation réincorporée a plus de 15 ans, seul un droit de partage de 2,5 % est dû sur la valeur actuelle des biens incorporés. L’opération permet alors d’éviter le coût d’une transmission entre la deuxième et la troisième génération.
À l’heure où hériter à plus de 60 ans n’est plus rare, sauter une génération dans le cadre d’une transmission présente un réel avantage pour accompagner patrimonialement les plus jeunes dans leurs projets. La législation française permet de le faire dans un cadre juridique sécurisé tout en bénéficiant d’une fiscalité particulièrement favorable.