Le Groupe Daniel mise sur l'électrique pour sa flotte de camions - Premium

Une pression sur un bouton, un très léger vrombissement et pas un frémissement : le camion a démarré. Son chauffeur Brice Morin, employé du groupe Daniel, sourit, content de son effet, avant de faire la démonstration de sa conduite. L’engin accélère comme une voiture et glisse sur la route toujours parfaitement silencieusement. « L’essayer, c’est l’adopter », sourit Caroline Gadomski Brouqueyre, responsable communication du groupe Daniel. L’entreprise béarnaise, spécialisée dans l’extraction de pierres et la production de matériaux de construction, vient de s’équiper de son tout premier camion électrique. C’est même le tout premier du Sud-Ouest, et l’un des dix premiers de France, précise-t-on du côté du groupe familial. « Notre groupe mène une démarche environnementale globale, de l’extraction jusqu’au transport, ajoute Caroline Gadomski Brouqueyre. Nous savons que le transport doit jouer un rôle majeur dans la transition énergétique et nous prenons des engagements. » Depuis 2019, le groupe est engagé dans un programme de réduction de ses émissions. Il est en particulier labellisé « Objectif CO2 ». « Nous travaillons par exemple sur des outils de suivi : nos chauffeurs ont accès à des indicateurs, des données pour être plus performants, optimiser leurs trajets. Ils sont aussi sensibilisés à l’éco-conduite », précise Caroline Gadomski Brouqueyre. La flotte de 125 camions du groupe Daniel est aussi classée Euro 6 (Norme européenne la plus récente sur la pollution des véhicules), et renouvelée tous les six ans, un rythme très élevé pour le secteur. Passer à la propulsion électrique était donc une étape logique pour l’entreprise.D'abord une phase de test« Le camion électrique était un de nos objectifs, reprend la représentante du groupe Daniel. Nous avons répondu, il y a deux ans, à un appel à projets de l’ADEME. L’appel portait sur trois camions et deux superchargeurs, aujourd’hui nous venons de recevoir le premier camion et nous sommes en phase de test. » Une phase qui concerne aussi le fournisseur du poids lourd, un FH42 TE produit par Volvo. « Le groupe Daniel est précurseur dans une démarche qui va bientôt concerner tout le monde », considère Christophe Choy, directeur commercial de Volvo Trucks à Pau. « En 2040, il n’y aura plus de véhicules thermiques. En 2030, la moitié des véhicules produits ne seront pas thermiques. Et aujourd’hui, les entreprises ont l’obligation de réduire leurs émissions polluantes ». « On ne peut pas attendre passivement le jour où le couperet arrivera, reprend Caroline Gadomski Brouqueyre, on essaie d’anticiper. »À lire également - Comment le groupe Daniel mise sur la brique en terre crue Outre l’impact environnemental, le passage à l’électrique répond aussi à des enjeux d’acceptabilité de l’activité du groupe auprès de la population et des autorités politiques. « Clairement, nous avons aujourd’hui beaucoup de difficultés à obtenir les autorisations d’extraction ou d’extension de nos sites. Personne ne veut de carrière près de chez soi, constate Caroline Gadomski Brouqueyre. Donc clairement, ça fait partie du dossier, quand les autorités regardent les moyens que l’on met en œuvre et qu’ils voient du transport électrique, cela joue en notre faveur. » De toute façon, reprend-elle, « tout le monde doit faire des efforts. On est attendus sur la neutralité carbone en 2050, ça passe aussi par des camions électriques. »« Ça change complètement la façon de travailler »« Ça change complètement la façon de travailler », témoigne Vincent Augé, responsable de la logistique au sein de groupe Daniel. D’abord car chaque chauffeur doit recevoir une formation spécifique, mais surtout, car si le camion affiche une autonomie théorique de 330 kilomètres, « en réalité, ça dépend des terrains », nuance Vincent Augé. Pour l’instant, le FH42 TE se contente de trajets « autour de Pau et dans les Landes. En zone montagneuse, ça se décharge plus vite, il faut recharger toutes les nuits ».Pour l’instant, le groupe utilise une borne de recharge classique, installée sur son site de Lescar. « La recharge dure neuf heures, donc le camion se recharge la nuit et ne peut pas rouler pendant ce temps-là », regrette Vincent Augé. Les superchargeurs commandés par le groupe en même temps que ses nouveaux véhicules électriques devraient être livrés en juin. « Ils permettront de recharger les batteries en une heure trente, prévoit le responsable logistique, et donc de rouler jour et nuit. On finira la journée à 17h30, on les mettra en charge, et les chauffeurs de nuit qui prennent leur service à 21h30 les trouveront chargées à 100%. » La maintenance des camions est également fondamentalement différente. « Ce sont des véhicules très lourds, avec donc des tensions et des intensités électriques très élevées, prévient Christophe Choy. Avant de commencer à travailler sur le camion, il faut le mettre en sécurité. C’est pas le mécanicien en interne qui peut le faire dans son atelier, il faut obligatoirement les ramener au garage. »Lourd investissement de départL’investissement de départ est aussi important. « Un camion électrique, c’est trois fois plus cher qu’un camion thermique, raconte Caroline Gadomski Brouqueyre. Mais l’ADEME a soutenu notre projet à hauteur de 34%. » Financièrement, l’opération est rentable, malgré le prix d’achat élevé : « Le camion doit rester dans le groupe sept ans. Au bout de cette durée, il faut regarder combien il a coûté globalement, en comptant l’investissement de départ, l’entretien, l’énergie consommée… énumère Christophe Choy. Et éventuellement, y soustraire la valeur de revente. Au moment où l’on a constitué le dossier, il y a deux ans, il ressortait que le véhicule électrique présentait un surcoût global de 4% par rapport à un camion thermique. » Depuis, le prix de l’électricité a diminué, et « il est probable qu’aujourd’hui, on soit même légèrement en-dessous du coût de revient d’un thermique ».À lire également - Enedis : « L'accélération de la transition énergétique n'est pas qu'une théorie »« Le camion coûte 350.000 euros, le chargeur en coûte 120.000, précise Christophe Choy. Mais il y a ensuite toute l’ingénierie à prendre en compte. » Car un superchargeur pour camions électriques ne se raccorde pas au secteur comme une vulgaire bouilloire. « Il faut mesurer la capacité du réseau, il faut creuser des tranchées, couler du béton… égrène le représentant de Volvo. Il se trouve que c’est le métier du groupe Daniel, et qu’ils ont une expertise et des installations électriques pour leurs machines : c’est plus facile de faire ce projet avec eux qu’avec un transporteur lambda qui a juste des ampoules dans son hangar. »« C’est pour ça que l’on fait cette période de test, conclut Vincent Augé. À l’automne, on recevra encore deux camions supplémentaires. Là, on saura bien à quoi s’en tenir, quels trajets sont possibles, comment organiser notre fonctionnement… » « Il faut se laisser un petit peu de temps, prendre les bonnes décisions et écouter le retour terrain, ajoute Caroline Gadomski Brouqueyre. En fin de compte, tout vient de là : les chauffeurs, leur ressenti, leur expérience, c’est primordial. »Groupe Daniel320 employésCA : 80 millions d'euros

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