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Qu’est-ce que Second Skin, la future seconde peau santé des astronautes ?

Innovation
mardi 20 juin 2023

L'un des défis sera d'intégrer l'ensemble des fonctionnalités sans entraver la mobilité. Crédit : Way4Space

La Nouvelle-Aquitaine veut être la terre d’émergence de la sous-combinaison spatiale du futur. Un appel à manifestation d’intérêt démarre pour monter le consortium ad hoc. Il réunira les bonnes fées appelées à se pencher sur le berceau de « Second Skin ». Plus qu’un simple textile technique, cette seconde peau de l’astronaute sera bardée d’électromécanique, de capteurs et d’intelligence embarquée, pour monitorer les signes vitaux, fournir des éléments de diagnostic en cas d’incident voire délivrer de premiers soins. Explications.

C’est dans le cadre du 54e salon du Bourget qu’a été lancé en ce début de semaine l’appel à manifestation d’intérêt (AMI) « Second Skin », porté par le centre néo-aquitain d’inspiration et d’innovation spatiales Way4Space, en partenariat avec les pôles de compétitivité Aerospace Valley et ALPhA RLH et avec le soutien du cabinet d’innovation Aktan. Second Skin vise à créer une sous-combinaison spatiale connectée, portée à même la peau par l’astronaute et conçue pour l’équiper lors de sa vie dans l’espace, à bord d’une station orbitale, d’un habitat lunaire ou même de sorties extravéhiculaires. « A mesure que les ambitions du NewSpace grandissent, la présence humaine associée aux activités de longues missions fait augmenter la probabilité de blessures ou de maladies. L’absence totale ou partielle de gravité, le fait de se retrouver avec des moyens et des espaces limités, tout cet environnement tend à complexifier le plus banal acte médical. Le préambule de ce parcours médical est donc clé et conditionne les capacités à prodiguer des bons soins », est-il fixé comme cadre dans le pitch vidéo de l’AMI.

Prévention et actions précoces

La première aptitude attendue sera de monitorer de manière non invasive toute une palette de signes vitaux : température, oxymétrie, électrocardiogramme, fréquence cardiaque, tension, taux respiratoire et de glucose, complété par un dosimètre. En synchronisant ces constantes avec l’historique des données de santé, il sera ainsi possible « de connaître l’état général du porteur » et d’indiquer « si la personne dispose des aptitudes nécessaires à l’exécution des tâches de son calendrier. Un manque de sommeil pourrait par exemple dégrader sa concentration et augmenterait le risque de blessures. Au cours de la journée, les données des capteurs de mouvement embarqués, croisées aux données psychologiques et physiologiques, permettraient de détecter les comportements dits anormaux, comme le manque de coordination ou des tremblements. Une API sera également disponible pour croiser certaines données comportementales avec celle des modes opératoires planifiés par l’employeur, mesurant plus finement l’écart et le risque », est-il détaillé.

L’autre aspect sera de mener sans attendre des actions urgentes. A commencer par la détection de position de type « homme mort », qui active une localisation en l’absence de mouvements pendant plus de 15 secondes et envoie un premier ensemble de données clés. En cas de coupures, la combinaison sera dotée de trois types de fibres techniques contenant respectivement gel antiseptique, gel coagulant et gel cicatrisant. Tissées au sein d’une matrice électro-conductrice, Second Skin sera ainsi en mesure de détecter, localiser et dimensionner la coupure et de transmettre automatiquement ces informations. En cas de blessure ou d’incident majeur, le vêtement possédera des anneaux de compression électromécaniques sur les quatre membres. Des patchs de défibrillation seront pré-positionnés et prêts au raccordement. Enfin, un système de cathéters capillaires sur la partie inférieure du torse permettra la diffusion de solutions médicamenteuses par mésothéprapie.

Et dans le cadre de missions de long terme, l’équipement servirait même à lutter contre les effets liés à l’absence de pesanteur. En générant une micro-résistance au mouvement ainsi que des électrostimulations automatiquement ajustées, c’est un véritable programme continu d’entraînement personnalisé qui serait ainsi accessible. L’ensemble cumulé fournirait un ensemble de données qui alimente de manière continue et automatique un jumeau numérique « bien-être et santé » de l’individu, à bord et au sol.

Quels experts, quelles étapes ?

L’AMI « est ouvert aux entreprises et aux acteurs académiques de la région Nouvelle-Aquitaine, « préférentiellement mais non exclusivement », est-il souligné. Au vu de l’ambitieuse vision cible, de très nombreuses expertises sont recherchées :
• une équipe médicale avec des compétences en médecine spatiale pour définir précisément les propriétés intrinsèques de la sous-combinaison en contact avec la peau (respirabilité, non allergène…), les paramètres « santé » à monitorer dans une série de contextes d’activités spatiales et les actions / réactions de la seconde peau à prévoir d’intégrer ;
• des fabricants de textiles techniques ou des concepteurs ayant une expérience dans la fonctionnalisation de textile (propriétés mécaniques, connectivité, conservation et distribution de substances médicamenteuses…) ;
• des fabricants de micro-actuateurs (micro ou nanosystèmes électromécaniques…) ;
• des spécialistes de la connectivité sol/bord/espace ;
• des acteurs du jumeau numérique ;
• des acteurs spécialisés dans la cybersécurité (RGPD, éthique…) ;
• une école de design qui pourrait intervenir sur la conception de la « Second Skin » de manière évolutive pendant la durée du projet  ;
• des experts bénévoles sur les conditions réelles d’utilisation d’un vêtement en ambiance spatiale.

En étape une, il s’agira de rédiger un cahier des charges fonctionnel et d’identifier plusieurs preuves de concept des différentes fonctionnalités visées. En étape deux, « sous réserve de l’obtention d’un financement » qu’on devine conséquent, la réalisation d’un prototype représentatif de la seconde peau sera étudiée. Les candidatures doivent être remise avant le 15 septembre prochain via hello@way4space.com. La sélection se fera par un jury présidé par le centre européen d’inspiration et d’innovation spatiale Way4Space et composé de représentants des pôles de compétitivité impliqués, de l’agence ADI NA, de l’association Digital Aquitaine ainsi que de personnalités choisies, d’une part sur un critère de pertinence technique et, d’autre part, sur un critère de motivation, notamment « la capacité à porter les innovations résultant du projet sur des marchés adjacents », ouvrant ainsi également la voie à des usages non spatiaux.

Cahier des charges (pdf) / Dossier de candidature (pptx)