5/5 Soule : tourisme et préservation de la nature vont de pair - Premium

D’un « bistrot casse-croûte » créé par le grand-père de Pierre Etchemaïté dans les années 30, l’établissement « Etchemaïté » aujourd’hui géré par lui et son épouse Cathy est devenu, dans les années 90, un « hôtel-logis » de 17 chambres, classé trois-étoiles, qui offre un service de restauration de qualité au cœur de Larrau. À 63 ans, le chef d’entreprise est à quelques mois seulement de la retraite. Mais l’entreprise va rester entre de bonnes mains. Son fils Ximun, 30 ans, qui souhaitait « rentrer au pays », reprend la suite. L’ancien ingénieur devenu cuisinier a fait ses armes sur la côte basque auprès de chefs qu’il admire, notamment Sébastien Gravé à Bayonne (la Table de Sébastien Gravé) et le chef étoilé Guillaume Roget (Ekaitza, Ciboure, ex-Le Brouillarta, Saint-Jean-de-Luz). Depuis son arrivée à Larrau, il insuffle un nouvel élan à la cuisine déjà semi-gastronomique proposée dans le restaurant de 60 couverts. « On apporte une touche un peu plus moderne aux plats traditionnels en allant vers le gastro », explique Ximun Etchemaïté, qui a à cœur de continuer à travailler les produits locaux et de qualité, en circuits courts. Randonneurs au rendez-vousLa création de l’hôtel dans les années 90 avait « apporté une nouvelle clientèle, se souvient Pierre Etchemaîté : des personnes qui viennent faire de la randonnée, se reposer pour quelques jours ». Des clients souvent fidèles, qui ont contribué au développement croissant du chiffre d’affaires, aujourd’hui proche d’un million d’euros. Partout en Soule, on trouve en effet de nombreux chemins de randonnée. Les incontournables des alentours de Larrau : la passerelle d’Holzarte et les gorges de Kakouetta. Les fermetures de la passerelle d'Holzarte pour travaux pendant 9 mois courant 2020, et celle des gorges de Kakouetta, toujours fermées depuis qu’une randonneuse a perdu la vie en raison d’une chute de pierres fin juillet 2020, n’est pas sans conséquences. « On a senti une certaine diminution de la fréquentation, commente Pierre Etchemaïté. Mais on a mieux travaillé avec moins de clients à l’hôtel ». Le développement de l’offre de restauration avec l’arrivée de Ximun Etchemaïté va en ce sens et attire toujours plus de clients locaux venus simplement dîner. Selon Nicolas Watteau, chargé de mission « Sports, nature et randonnée » pour le département des Pyrénées-Atlantiques, les gorges de Kakouetta sur la commune de Sainte-Engrâce étaient « l’aimant des visiteurs », qui au détour de leur visite de Kakouetta en profitaient pour passer à la passerelle d’Holzarte, sur la commune de Larrau. Ainsi, après un pic du nombre de visiteurs de la passerelle d’Holzarte à près de 62 000 en 2020, le nombre de visiteurs a baissé chaque année à partir de 2021, pour arriver à 52 785 en 2022. Pour 2023, les chiffres sont arrêtés à fin août, mais la baisse de la fréquentation reste perceptible au regard de la fréquentation estivale. Sur juillet/août 2023, 20 459 personnes ont visité la passerelle d’Holtzarte, contre 26 350 en 2022, 34 338 en 2021 et 47 504 en 2020. En 2024, les gorges de Kakouetta vont rester fermées, selon la mairie de Sainte-Engrâce. Des solutions sont à l’étude pour la suite, mais rien n’est encore établi ni divulgué quant à une éventuelle réouverture l’année suivante. Le nombre de randonneurs qui traversent la passerelle en parcourant le GR10 reste stable quant à lui, pose Nicolas Watteau. « Entre 1.700 et 2.000 personnes » empruntent ainsi chaque année la portion souletine du GR10. Ce chiffre annuel avait doublé en 2020, à la faveur de la période COVID, qui avait vu naître des envies de nature et de randonnée demeurées jusqu’alors silencieuses. En 2021, selon les chiffres de l’observatoire économique du Pays basque (porté par la CAPB et la CCI Bayonne-Pays basque), le tourisme représentait 4 % des emplois salariés en Soule, contre 8 % sur la côte (les chiffres plus récents ne permettent pas cette analyse, car ils incluent le secteur du tourisme dans celui des services). Le poids du chiffre d’affaires des entreprises du tourisme en Soule représentait en 2022 moins de 1 % du chiffre d’affaires de ces entreprises sur l’ensemble du département (contre 47 % pour le pôle Côte Basque Adour), un chiffre en baisse de 10 % entre 2021 et 2022, selon les chiffres clé 2022 de l’Agence Départementale Tourisme 64. D’après cet état des lieux, en Soule, on compte entre 0 et 1.000 lits marchands en Soule avec une concentration des sites-musées et activités touristiques autour de Mauléon. En phase avec la nature C’est principalement autour des activités nature que le tourisme se structure en Soule, confirme Nicolas Watteau. Parmi elles, la randonnée donc (d’autres chemins connus traversent la Soule, notamment la voie du piémont pyrénéen sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle), la spéléologie, le canyoning ou encore le VTT. Le département travaille d’ailleurs sur une voie de VTT entre Izarbe et Iraty, qui devrait ouvrir fin juin ou début juillet, selon le chargé de mission. En parallèle, la Communauté d’Agglomération Pays Basque travaille sur la mise en place de circuits de VTT labellisés sur la province souletine. « La Soule est vraiment sur ce créneau d’une nature très préservée, notamment grâce à l’activité pastorale qui contribue au maintien des paysages. Il y a un gros effort des opérateurs pour montrer que le tourisme et le pastoralisme ne vont pas l’un sans l’autre », commente-t-il. Parmi ces opérateurs, Les Chalets d’Iraty, où l’on peut louer des chalets en bois au cœur de la forêt d’Iraty et effectuer des activités nature, notamment des promenades en raquettes l’hiver, porte un modèle singulier. « La Commission syndicale du Pays de Soule, où un élu de chaque commune siège, est en charge de quatre piliers : la gestion du bois, la chasse, le pastoralisme et le tourisme. Dans ce cadre, une régie gère les Chalets d’Iraty pour le compte de la Commission syndicale », explicite Josy Arrossagaray, la directrice des chalets d’Iraty. « Les chalets d’Iraty sont gérés comme un outil de développement territorial ». Les premiers chalets ont été construits en 1968. Aujourd’hui, on trouve 35 chalets de 2 à 12 personnes, deux collectifs, trois chambres d’hôtel, une aire naturelle de camping et deux gîtes d’étape sur le chemin du GR10. Depuis quatre ans, une boutique principalement consacrée à la vente de produits locaux a aussi été créée aux Chalets d’Iraty. « Notre rôle est que les gens consomment local et que le tourisme profite à un maximum de personnes dans la vallée », souligne la directrice des Chalets d’Iraty. En 2023, sur un chiffre d’affaires global de 1 400.000 euros, 250.000 euros correspondaient au chiffre d’affaires de la boutique. Malgré les faibles chutes de neige cette année, les week-ends affichent complet assure Josy Arrossagaray. « Il s’agit d’une clientèle locale, voire ultra-locale », précise-t-elle. « Mais il y a moins de locations de dernière minute qui tombent. » Pour remplir les chalets en semaine, son objectif est de développer l’offre pour les séminaires d’entreprises et de proposer pour cela « des activités qui aient du sens à Iraty ». Parmi celles envisagées : des activités autour des bienfaits du froid sur le corps et l’esprit ou de la dégustation de vin en pleine nature. Sur la suite, Josy Arrossagaray reste, elle aussi, optimiste : « Ce sur quoi on insiste, c’est que le territoire est très particulier, la forêt et la nature sont vraiment très ressourçants. »

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