Futur Utopia à Cenon : le château Palmer va entamer sa mue - Premium

Quelle est la genèse d’Utopia Palmer ?Pour nous, ça s’inscrit dans le projet Utopia, qui a une existence, puisqu’il a maintenant 50 ans. Avec le premier Utopia Avignon qui est encore bien vivant, créé en 1976. C’est d'abord être dans la lignée des cinémas Utopia, de leur philosophie, de leur mode de fonctionnement qui est quand même assez particulier, et puis de leur indépendance aussi. C’est le tronc commun. Et la deuxième branche à laquelle on se raccroche c’est Utopia Bordeaux qui existe depuis 25 ans maintenant, septembre 1999, et qui fonctionne bien et a développé des relations avec tous les acteurs un peu économiques, culturels et sociaux de la métropole. Pourquoi Cenon ?C’est un territoire intéressant pour nous qu'on a découvert, alors de manière personnelle déjà, je suis habitant de la rive droite, on est quelques-uns à l'être, et puis par l'entremise du Rocher de Palmer qui a fait une grosse modification du paysage culturel il y a un peu plus de dix ans quand ils se sont installés là-bas. On a de très bonnes relations avec eux, on a fait quelques séances hors les murs, c'est-à-dire des collaborations entre le Rocher et Utopia. Au bout de trois ans - ça a commencé en 2016 de mémoire - on s'est dit notamment avec Patrick Duval qui est le programmeur du Rocher, au titre de Musiques de nuit, est-ce qu'on ne peut pas aller plus loin, est-ce qu'on aurait pas une petite place pour faire une programmation ? On est vite tombé sur des problèmes juridiques. On est un cinéma avec un certain nombre de contraintes et d'autorisations, on ne peut pas faire des déplacements de séances comme ça tout le temps. C’est à ce moment-là que nos relations sont entrées en jeu avec les gens de la mairie qui suivaient ça d'un œil, et puis on s'est mis autour d'une table. On a imaginé différents lieux que la mairie possède ou dont elle peut disposer, et puis finalement on a entendu parler de rénovation un peu importante à faire dans ce petit château. Et on a mis les architectes sur le coup. L’idée de s’installer là-bas, c'était fin 2018-2019.Puis la mairie de Cenon a lancé un appel à manifestation d’intérêt ?Mais avant ça, il y a eu le Covid. En mars 2020, on ferme et c’est quand même un gros coup d’arrêt. Mais on refait surface avec la même envie, en 2021, si ma mémoire est bonne, avec l'idée pour la mairie de faire cet appel à manifestation d’intérêt puisque c'est un bâtiment public.Avec un contrat sous la forme d’un bail emphytéotique…C'est convenu pour 99 ans. À charge pour nous d’entretenir et de rénover le lieu. La totalité des travaux reste à notre charge. Ce qui leur semblait très important, c'est que ce patrimoine récupéré dans les années 70 reste la propriété de la Ville de Cenon, c'est tout-à-fait légitime.Quelle sera la capacité d’Utopia Palmer ?Entre 250 et 255 sièges, selon les versions et la capacité réelle qu'on va trouver sur place avec une salle qui fait environ 120 places, qui est une assez grande salle pour nous, et puis deux salles plus moyennes, autour de 75 et 55 sièges. Le château dispose de trois niveaux. On va évacuer le dernier niveau, parce qu'on a besoin de pas mal de hauteur dans les salles pour qu'il y ait des projections qui viennent d'au-dessus. On va utiliser tout le rez-de-chaussée et une partie de son sous-sol pour créer une salle au RDC et deux autres salles à l'étage, ce qui sera un étage double en fait, dont la grande salle de 120 sièges. Alors c'est un peu particulier quand on le dit comme ça, mais c'est très justifié parce qu'on s'est aperçu à Utopia que la capacité d'une salle, d'une grande salle, ça induit quelque chose en matière de rapport à la programmation et de rapport humain. Ce qu'on souhaite faire avec le projet à Cenon, c'est ce qu'on a quasiment toujours fait depuis le début avec Utopia, c'est de faire des cinémas de proximité, des cinémas où ça vit, c'est un lieu de vie. Ce n’est pas un lieu de passage, ce n’est pas un lieu qui marche très fort le samedi et puis le lundi on se trouve dans une salle à 15 alors qu'elle fait 500 ou 400 places. C’est un cinéma du quotidien, de la rencontre.La mission de maîtrise d'œuvre a été confiée à l'agence d'architecture bordelaise Shalumo. Crédit : Shalumo Architectes Il sera doté d’un espace restauration, comme à Bordeaux,...On va adjoindre un petit lieu convivial, ce n'est pas un stand de confiserie mais c'est plutôt un petit café, quelque chose qui donne une vie comme ça et où on peut passer. On aimerait faire à Cenon ce qu'on a réussi à faire la plupart du temps ailleurs, c'est-à-dire effectivement cette espèce de vie, de refuge quasiment culturel qui nous permet de voir le monde autrement.... dont la gestion sera confiée à un acteur extérieur ?Je ne l’ai pas connu mais la gérance d'un café par les gens du cinéma, ce n’est pas une bonne expérience. ll faut que ce soit des gens qui soient des cafetiers, des restaurateurs. C’est une sorte de mise à disposition, de contrat avec un exploitant qui fera un petit peu son bar/restaurant à son image. Et si l'on peut aller un peu plus loin en se disant que ça peut être des choses qui soient un petit peu plus mobiles qu'un restaurateur fixe, ça nous plaît encore plus. On a l'impression que sur les quartiers de Cenon, on peut vraiment avoir une richesse plurielle dans ce qu'on propose en essayant de rassembler des restaurateurs ou des quasi amateurs.Quelles sont vos attentes en matière d’aménagement pour ce futur cinéma de 800m² ? [ndlr, Utopia Bordeaux : 1.400m²] Chaque projet est vraiment unique. Nos ambitions nous poussent toujours vers des bâtiments assez atypiques, voire historiques. Une des premières choses qu'on a mis en place avec les architectes, avec qui on s'est très bien entendu sur ce sujet, c'est d'abord de sculpter le bâtiment, de le regarder, de le respecter dans son identité, et après d'agir. Le deuxième pari était d’y adjoindre immédiatement un bureau d'études environnementales très exigeant. On s'insère dans un parc qui a sa propre vie, on a pris très très vite la mesure de notre impact, de notre installation, et on a cherché à valoriser tout ce que le château pouvait nous apporter.« On n'installe pas de climatisation dans notre bâtiment »Pouvez-vous nous citer un exemple ?Oui, ce sont les murs du château qui font dans les 70-80 centimètres en pierres anciennes, c'est un rempart gigantesque contre le froid et contre le chaud. Si on le traite bien, c'est magnifique, si on le traite mal et qu'on met un isolant et du placo dessus, ça ne va pas bien se passer. Ce qui a notamment été fait dans les rénovations successives de ce bâtiment. Aujourd'hui on sait que si on fait bien les choses avec des mesures sérieuses, on n'installe pas de climatisation dans notre bâtiment. C’était une vraie victoire. Un projet de cette taille-là, je ne peux pas être tout à fait affirmatif mais je pense que c'est assez novateur, voire pionnier. On arrive à gérer avec des principes de passivité du bâtiment et de bonne ventilation, de prise d'air quand il fait frais, de cloisonnement quand il fait chaud par exemple, et à être très économe en matière d'énergie. On va mettre les salles de cinéma pour lesquelles on a besoin de frais du côté nord-nord-est. C’est simple, c’est du sur-mesure. La pratique est inédite et collée à ce que le projet exige. Ça a été moteur et ça a guidé toute notre vision.Et concernant les matériaux ?On va faire une étude sérieuse de tout ce qui est réemploi, et ensuite l'utilisation quasi exclusive de matériaux bio et géosourcés. On est sur du chanvre et sur des laines de bois qui sont faits localement, principalement par exemple pour les isolants, donc on va rester sur ce genre de choses.Avec la volonté de vous appuyer sur le local ? Absolument, c'est la priorité. Alors je ne vous dis pas qu'on le fera sur 100% du projet, mais l'essentiel sera tourné là-dessus.À quel stade en est le projet aujourd’hui ?Le bail définitif n'est signable que quand on a la certitude que le projet se fait entièrement. On avait mis dans la promesse de bail des conditions suspensives de part et d'autre, à la fois pour la mairie et à la fois pour nous, que nous sommes en train de lever progressivement. En gros la dernière qui reste pour nous, c'est la validation des financements globaux qui est en cours. Ce projet s’appuie beaucoup sur nos fonds propres et sur de l'emprunt, donc c'est de l'auto-financement. Et puis on va chercher nos partenaires habituels du secteur culturel pour essayer de donner un coup de pouce à notre installation, sachant que la philosophie d'Utopia c'est de ne pas recourir aux subventions de fonctionnement. Après on a un ensemble de partenaires au niveau national ou local qui peuvent nous aider. C’est le CNC d'abord pour nous, c'est le Centre national du cinéma, c'est l'instance nationale qui dépend du ministère de la Culture, qui a un certain nombre de dispositifs et on a eu une attribution favorable pour notre projet. Ensuite ce sera plus local, ce sera la région, ce sera l'Europe, ce sera le département, et tout ça est pour partie plus ou moins acquis, à l'automne au plus tard. Une fois qu'on a tous ces financements et l'accord bancaire, on signe. Si tout se passe bien, on pourra signer le bail définitif en fin d’année et attaquer nos travaux. Vous avez recours à de l’emprunt ?Pour l’instant, il n'y a pas d'emprunt. C’est le financement par Utopia Bordeaux, et par le financement participatif qu'on a développé jusqu'ici. Ce sont nos deux sources de financement qui nous permettent de faire l'avant-projet. Pour la réalisation des travaux dans sa totalité, ce sont les acteurs dont je vous ai parlé juste avant qui financent, on est pas sur les mêmes montants. Si l'avant-projet tient la route et qu'on a les financements, on va au bout et on fait le projet en totalité. On est entre ces deux phases, on est quasiment en train de démarrer le projet.Et le financement participatif a permis aussi d’informer ?Il a créé une émulation autour du projet pour voir s'il y avait de l'envie côté public, pour voir s'il y avait une attente, et nous on l'a reçu comme très forte. On a quand même collecté plus de 44.000 euros avec la plupart des petits dons de nos spectateurs ou d'autres qui ont fait parfois des plus gros dons. On a été parfois très surpris et honoré de ce que les gens peuvent investir comme ça. C’est une confiance incroyable et on est très reconnaissant. Ça a été une très bonne expérience de fédérer des gens autour de ce projet-là, c'était super. Et ça a aussi permis de communiquer autour du projet.« On est sur une enveloppe de 2,8M€ »L’enveloppe pour les travaux était de 2,5 M€. A-t-elle augmentée ?C’est un projet assez ancien, la crise du BTP, la guerre en Ukraine, il y a des choses qui ont beaucoup évolué. On essaye de contenir et d'être le plus sobre et raisonnable possible, et on a quand même une augmentation de l'ordre de 10%. On est sur une enveloppe de 2,8 millions d’euros et on est à peu près stabilisé là-dessus.Combien de personnes travailleront à l’Utopia Palmer ?On a un équivalent de quatre temps pleins pour l'instant côté cinéma. Après, ça va se développer avec l'activité. Ce qui explique cette taille relativement modeste d'équipe, qui peut se ventiler en cinq ou six personnes avec des temps partiels, c'est la jonction à la salle de Bordeaux. On a beaucoup de synergies qui peuvent se faire avec une programmation commune. On a pas mal de choses qui seront faites en commun.Avec une ouverture des portes à quel horizon ?Idéalement fin 2025, je pense que c’est optimiste. C’est toujours difficile de donner des dates définitives. On va voir ce qu’on trouve en ouvrant le bâtiment. Les travaux vont avoir un impact sur le calendrier. Globalement, on prévoit une douzaine de mois de travaux. Si on commence en début d’année, théoriquement ce sera début 2026.Un projet sur le point d’aboutir mais qui aura pris beaucoup de temps ? Comme on a quasiment cinq ans maintenant de projection dans ce cinéma, on en tire un bénéfice. Avec une période de préconception qui est aussi longue, finalement on s'y retrouve derrière en fait. On fait moins de bêtises, on ne le fait pas dans l'urgence, on le fait posément et on va y gagner vraiment énormément dans notre fonctionnement, dans ce qu'on veut. Ça nous est tombé un peu dessus comme ça. Le temps qu’on s’est donné pour construire ce projet là, il est capital, j’en suis persuadé aujourd’hui.À quoi ressemblera le futur Utopia Palmer ?Il n'y a pas lieu de mettre forcément de déco d'inspiration religieuse dans ce bâtiment comme à Bordeaux qui est installé dans une ancienne église. Dans un château, il y a une autre histoire. Jusqu'à la deuxième guerre mondiale, c'était un édifice où l’on fabriquait du vin, donc on trouvera des choses. Mais effectivement on gardera quelque chose d'extrêmement chaleureux. enfin c'est notre ambition et assez intemporel. C’est inscrit un peu dans les gènes d’Utopia. On aura aussi une mise en valeur du bâti. On va retrouver une pierre, on va retrouver des couleurs et une chaleur qui est inhérente au bâtiment.Utopia Bordeaux (SCOP) 12 personnes1,4 M€ de CA

Futur Utopia à Cenon : le château Palmer va entamer sa mue - Premium

Sur le même sujet

Près de 200 logements à construire...

Un marché global à 30M€...

Bazas : une 7e ZI, Voltéo en tête de gondole

Assises de l'Économie de la Mer : « Une grande première pour ...

Le Bordeaux Invest Day revient le 3 octobre pour une 10e édi ...

« La force de l'entrepreneur : avoir un bon réseau », l'infl ...

Avec le salon Horizon(s), le jeu vidéo se rassemble en pério ...

Nouvelle-Aquitaine : l’association Transtech organise une jo ...

Réindustrialisation : « Nous demandons aux grands groupes de ...

Club Résolution #2 : comment engager ses parties prenantes ?

L'entrepreneuriat dans tous ses états : RV le 5 septembre à ...

David Douillet, les valeurs du sport au service de l'entrepreneuriat

Placéco Live : Laure Babin, dirigeante de Zèta, veut commercialiser des « baskets à planter »

La chronique innovation : Reachy, le robot humanoïde bientôt autonome de Pollen Robotics

Keenat à la conquête de l'Europe avec sa solution Ecomégot

La chronique innovation : VELA veut décarboner le transport maritime

La chronique innovation : Hypnoledge met l'hypnose au service de l'apprentissage

Digiteco #13 : Les technologies immersives au service de la formation, promesses et freins