Space Cargo Unlimited : une levée de fonds pour créer l’industrie européenne des micro-usines spatiales - Premium

« Vous allez pouvoir être propriétaire d’un vaisseau spatial », sourit Nicolas Gaume devant les potentiels investisseurs, lors de la levée de fonds participative qu’il vient de lancer avec l’appui de la plate-forme bordelaise Tudigo. Une punchline aguicheuse, mais qui ne vend pas que du rêve. Space Cargo Unlimited, sa 8e entreprise, qu’il a officiellement créée début 2018 avec son associé Emmanuel Etcheparre et qu’il préside, réalise actuellement un tour de table de 9 millions d’euros - dont 6 millions sont déjà sécurisés auprès d’Eurazeo et de Geodesic - avec un volet de financement participatif qui pourrait se situer entre 1 et 2 millions. « Je suis convaincu que le spatial a des clés pour l’avenir de l’humanité. Ce que nous faisons, c’est une plateforme dont on veut qu’elle bénéficie à la fin à des entreprises et des industries qui font l’humanité. Comme l’industrie pharmaceutique, l’agriculture, les nouveaux matériaux, l’électronique. J’ai eu l’idée de Space Cargo Unlimited il y a 10 ans, les opportunités pour des entreprises d’exister aux côtés des géants industriels historiques étaient très limitées quand on a démarré. Il a beaucoup de similarité avec Internet et les infrastructures des télécoms des années 90, avant l’émergence de tout ce qui a été le web et le mobile tels qu’on les connaît aujourd’hui. Si on veut être capable de développer une infrastructure qui va toucher les gens, c’est important qu’ils arrivent à se connecter avec ce qu’on fait. On ne peut pas faire les choses en isolation », argumente-t-il.Des usines dans l’espace« On veut être la première startup européenne qui envoie des micro-usines autonomes dans l’espace », reprend le dirigeant devant le parterre. Pourquoi dans l’espace ? « C’est le seul endroit où on peut s’affranchir durablement de la gravité. » Ce qui, en sciences et en industrie, ouvre la voie à tout un potentiel impossible à envisager sur le plancher des vaches : de nouveaux alliages, des fibres optiques 100 fois plus conductrices que celles fabriquées sur Terre, de nouveaux médicaments ou des plantes aux propriétés inédites. Ainsi de ce projet pilote mené avec le CNES et l’INARE, qui a permis de développer des plants de vignes innovants. « Du cabernet sauvignon et du merlot. En s’adaptant à l’absence de gravité, les plantes sont devenues 10 fois plus résistantes au mildiou. Sans chimie c’est-à-dire sans intrants. On s’associe avec Mercier, pépiniériste viticole situé en Vendée et on va mettre cette vigne sur le marché l’année prochaine. » Outre une première preuve de production spatiale à forte valeur ajouté, cette innovation apportera des revenus à la jeune pousse bordelaise. Et pourquoi l’autonomie ? « Quand on met un humain dans l’espace, tout coûte immensément plus cher, parce que sa sécurité prévaut », calcule Nicolas Gaume.L’idée est donc d’arriver à produire quelque chose dans l’espace, sans présence humaine. C’est tout l’objet de la « bentobox ». « C’est là où il y a toute l’intelligence, c’est développé dans nos locaux à Bordeaux. » La vision cible, c’est une bentobox d’une tonne, pour un volume utile de 1.200 litres, pour accueillir les productions industrielles automatisées. Laquelle sera envoyée dans l’espace avec Rev1, le fameux vaisseau spatial dont on peut devenir partiellement propriétaire via le financement participatif, avec un ticket d’entrée à 1.000 euros. Pour le créer, Space Cargo ne part pas de zéro et collabore avec Thales Alenia Space, en « partant d’un véhicule qui a déjà volé [ndlr, l’IXV, Intermediate eXperimental Vehicle], ce qui permet de largement baisser les coûts. Il devrait être opérant à partir de 2028 ».Un premier vol en 2025En attendant, ce tour de table de 9 millions doit notamment permettre de sécuriser un vol spatial auprès de SpaceX, qui pourrait avoir lieu en début d’année 2025. Il s’agira d’envoyer dans l’espace une version à l’échelle 1/10e de la bentobox. Décollage depuis Cap Canaveral, production ultra-secrète dans l’espace et récupération de la boîte au niveau des Açores. « Ça va montrer la réalité de ce marché, parce que pour le moment, le “fabriqué dans l’espace” est un concept qui ne résonne pas encore. » Ensuite, Nicolas Gaume entend bien enclencher une vraie dynamique commerciale. « On a déjà signé trois clients, institutionnels et commerciaux, un quatrième est sur le point de l’être et on discute avec une cinquantaine d’autres. On remplit déjà les vols, avec deux prévus en 2026 et quatre en 2027 », planifie le dirigeant.Retour du Rev1 et de sa bentobox. Produire dans l'espace et exploiter ensuite sur Terre. Crédit : Space Cargo UnlimitedCe faisant, Space Cargo Unlimited se met sur une trajectoire pour espérer réaliser « 8 millions d’euros de chiffre d’affaires sur l’année 2024/2025, puis d’être à 20 millions d’ici trois ans, avec une bonne profitabilité », annonce Nicolas Gaume. « On pourra ensuite faire des levées plus importantes, pour financer la version définitive du Rev1 et enfin arriver à une trajectoire dont l’horizon est de l’ordre de 200 millions d’euros de chiffre d’affaires par an », se projette-t-il. Un futur où il espère aussi que le new space à l’européenne, voire à la française, permettra aussi d’envisager des lancements s’affranchissant des engins SpaceX.☞ Concernant le retour sur Terre de la bentobox, « compliqué mais possible », Space Cargo Unlimited devrait selon nos informations annoncer dans quelques semaines un partenariat hautement stratégique avec une société européenne qui développe des technologies innovantes de bouclier thermique permettant la rentrée dans l’atmosphère. À suivre…Space Cargo UnlimitedSASU fondée en janvier 2018Siège social à BordeauxEffectif : une cinquantaine de personnes, une majorité en régie de Thales Avenia SpaceCA : prévisionnel de 8 M€ sur 2024/2025

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