Pourquoi Famille Michaud veut professionnaliser la filière miel - Premium

Famille Michaud Apiculteurs, qui emploie 235 salariés sur son site de production et de conditionnement à Gan, a réalisé en 2024 un chiffre d’affaires de 140 millions d’euros. L’entreprise exporte aujourd’hui ses produits dans 71 pays, de l’Europe centrale au Moyen-Orient, en passant par l’Océanie et l’Asie, pour un total de 21% du chiffre d’affaires global. La grande distribution en France reste son principal canal de commercialisation, représentant 60% de ses ventes. « On reste le premier acheteur et le premier promoteur de miel français en grande distribution : un pot sur trois vendu en GMS est du miel de France vendu par Famille Michaud », rappelle Romain Le Nouaille, directeur marketing et communication. Après plusieurs années de recul, le marché du miel en grande distribution a retrouvé de la vigueur en 2024, progressant en valeur et en volume à un rythme deux fois supérieur à celui de la confiture, se félicite-t-on du côté de l’entreprise gantoise. 74% des Français ont acheté du miel en 2024, dont 54% en grande surface, le reste privilégiant les circuits courts, les ruchers locaux, les marchés ou les réseaux bio. Sur 12 mois, 700.000 nouveaux consommateurs ont rejoint le marché, soit une hausse de 6,2%. Famille Michaud a bénéficié de cette tendance et a progressé deux fois plus vite que le secteur dans son ensemble. Position dominante sur le marché françaisLe marché du miel demeure largement dominé par les marques de Famille Michaud : Lune de Miel (24,5% de part de marché en valeur et 28,9% en volume), Miel l’Apiculteur (14,3% en valeur et 12,3% en volume), La Ruche aux Délices (1,8% en valeur et 1,5% en volume), Famille Michaud (2,8% en valeur et 2,2% en volume) et la nouvelle venue Beeliz, destinée à séduire les consommateurs de moins de 35 ans, moins friands de miel, par un engagement revendiqué pour la biodiversité (« Chaque pot vendu permet de financer la plantation de 100 fleurs via une association partenaire », détaille Romain Le Nouaille), qui s’établit à 1% de part de marché en valeur et 0,8% en volume. L’ensemble de ses marques représente 44,4% du marché en valeur et 45,7% en volume, un niveau stable malgré une légère régression.Sur les deux autres marchés des « sucrants naturels » que sont le sirop d’érable et le sirop d’agave, Maple Joe, la marque de sirop d’érable, s’appuie sur 300 acériculteurs proches de son site d’embouteillage au Canada. Le marché français du sirop d’érable atteint 15,9 millions d’euros, en hausse de 2,7% en volume, avec une part de marché de 61% en valeur et 62% en volume pour Maple Joe. Quant au sirop d’agave, il pèse 18,1 millions d’euros en France, en croissance de 5,1% en valeur et de 13,2% en volume (2.024 tonnes). Par le biais de sa marque Sunny Via, Famille Michaud en détient 59,5% en valeur et 53,5% en volume.À lire également - Comment les miels Michaud diversifient leur gamme pour conquérir de nouveaux marchés En avril 2025, Famille Michaud a lancé, au sein de la marque Lune de Miel, une nouvelle gamme baptisée « Trésors de la ruche », développée « après deux ans de recherche et développement », assure Romain Le Nouaille, et qui associe le miel à des ingrédients naturels permettant de revendiquer des allégations santé, ce qui est interdit pour le miel seul. « L’objectif est triple : proposer des produits bons au goût, réduire le nombre d’ingrédients et conserver des prix accessibles », explique le responsable marketing. La même logique est à l’œuvre sur le marché du sirop d’agave, avec le lancement d’une version « enrichie en vitamine B6 et en manganèse ». Des récoltes fragilisées par le climat La dépendance aux aléas climatiques reste un défi majeur pour l’apiculture. En 2023, la production française de miel s’établissait à 29.857 tonnes. Elle est tombée à 21.585 tonnes en 2024, après un printemps froid et pluvieux qui a pénalisé la floraison du colza. L’année 2025 a commencé sous de bons auspices, mais les canicules de juin ont brutalement interrompu les miellées estivales, qui représentent habituellement 70% des volumes. Les apiculteurs font état de rendements historiquement bas : pour le miel de lavande, les récoltes habituelles de 15 à 20 kilos par ruche n’ont pas dépassé six kilos cette année. Certains ruchers de 300 ruches n’ont produit que 40 kilos au total. « On enchaîne deux années mauvaises. Il faudra s’attendre à des augmentations de prix dans l’année à venir », prévient Damien Faggion, responsable achats et matières premières. Professionnaliser la filière pour produire plusLa fragilité de la filière française tient aussi à sa structure. Seuls 3% des apiculteurs sont des professionnels. La très grande majorité, soit 92%, possède moins de 50 ruches, ce qui limite leur capacité de production. À titre de comparaison, l’Espagne compte deux fois moins d’apiculteurs mais produit davantage, grâce à une organisation plus professionnalisée. Famille Michaud, premier acheteur et promoteur du miel français, plaide pour une transformation en profondeur. « C’est un métier technique, nous travaillons à amener les apiculteurs à se professionnaliser, à produire plus et mieux », explique Romain Le Nouaille. L’entreprise milite pour que la déclaration des volumes de production soit réalisée dès la fin des récoltes, et pour que l’analyse des miels devienne obligatoire avant toute commercialisation.Une directive européenne validée en 2024 et applicable au 1er juin 2026 imposera une plus grande transparence sur l’origine des miels, avec l’obligation d’indiquer les pourcentages géographiques sur les assemblages. Si l’entreprise se félicite de cette avancée, elle regrette que l’analyse des produits n’ait pas été rendue obligatoire. La plainte déposée par l'association de consommateurs UFC-Que choisir en 2024 pour pratiques commerciales trompeuses a été classée sans suite, annonce Romain Le Nouaille. Une « très bonne nouvelle accueillie avec enthousiasme », considère le responsable, qui salue une « belle reconnaissance pour le sérieux de l’entreprise ».

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